Corps de l’article

Introduction

D’après les données du recensement national de la population canadienne réalisé en 2021, l’immigration représentera la seule source de croissance démographique d’ici 2041 (Statistique Canada, 2022). Selon Statistique Canada (2022), si les tendances se maintiennent, la moitié de la population canadienne sera alors formée d’immigrants et d’enfants nés de parents de la migration. De plus, la population noire devancera alors, pour la première fois, celle des Chinois. L’Ontario, pour sa part, a accueilli durant la période 2018-2023 un taux variable allant de 41,8 % à 47,2 % de l’ensemble de l’immigration canadienne. De plus, la francophonie ontarienne compte, en 2021, 77 285 personnes nées à l’étranger dont le français est la seule première langue officielle parlée, soit 16,2 % de sa population (Auclair, Frigon et St-Amand, 2023). La majorité de cette population francophone issue de la migration appartient à une minorité visible noire : sur ces 16,2 %, 8,3 % viennent d’Afrique et 1,6 % viennent d’Haïti (Auclair, Frigon et St-Amand, 2023). Par minorités visibles, on désigne, selon la Loi sur l’équité en matière d’emploi (S.C. 1995, ch. 44, art. 3) toutes les personnes, autres que les Autochtones, qui ne sont pas de race blanche ou qui n’ont pas la peau blanche. Par ailleurs, au Canada, de septembre 1995 à mai 1996, 88 % des jeunes de 15 à 19 ans membres des minorités visibles fréquentaient l’école, contre 81 % des adolescents du reste de la population (Statistique Canada, 2001). Les écoles de l’Ontario sont ainsi représentatives de la diversité culturelle, tant dans l’accueil des élèves qu’au sein du corps enseignant. Toutefois, les enseignants issus des minorités visibles noires font état d’expériences d’exclusion et de racisme lors de leur insertion dans les écoles francophones en Ontario (Jabouin, 2018). Selon eux, les employeurs, en plus d’exiger d’eux une expérience de travail canadienne, semblent préférer embaucher de nouveaux enseignants natifs du Canada (Conseil des ministres de l’éducation du Canada [CMEC], 2014). Malgré la pénurie d’enseignants en Ontario, l’insertion professionnelle d’enseignants immigrants francophones d’ascendance africaine demeure donc difficile (Vachet, 2019).

En 2015, le rapport de l’Ontario Alliance of Black School Educators [OABSE] a mentionné de possibles discriminations lors du processus d’embauche des enseignants noirs. Ces enseignants s’inséreraient plus difficilement que les natifs blancs (OABSE, 2015). Pourtant, certaines études (Jabouin et Duchesne, 2018; Niyubahwe et al., 2019) ont révélé un lien entre la réussite de l’insertion des enseignants issus des minorités visibles et la réussite des élèves issus de l’immigration. En effet, ces enseignants se considèrent comme des modèles et s’engagent davantage dans des rôles de soutien afin de favoriser l’intégration des élèves issus de l’immigration (Niyubahwe, Mukamurera et Jutras, 2019). Ainsi, le manque de représentation d’enseignants issus de la diversité ethnoculturelle noire pourrait porter préjudice à la réussite des élèves issus des minorités visibles ainsi qu’à la préparation à une main-d’oeuvre de plus en plus diversifiée. La réussite de ces élèves implique en effet un milieu d’apprentissage inclusif, où les obstacles sont identifiés et éliminés. Elle se réalise lorsque ces élèves se sentent respectés, représentés et en sécurité dans leur apprentissage (Ministère de l’Éducation de l’Ontario [MEO], 2009).

Cadre théorique

L’insertion professionnelle comme processus multidimensionnel

Cet article présente les résultats d’un des volets d’une recherche sur les trajectoires d’insertion professionnelle de nouveaux enseignants originaires des Caraïbes et d’Afrique subsaharienne dans les écoles francophones de l’est de l’Ontario (Jabouin, 2018). Plus précisément, il porte sur les données émergentes de l’expérience de ces enseignants en lien avec leur impact sur la réussite scolaire des élèves issus de parents de la migration. Nous y faisons le postulat que comprendre l’expérience de réussite de l’insertion de ces enseignants ainsi que le contexte par lequel la réussite des élèves se profile permet de soutenir la réussite des élèves issus de l’immigration et d’encourager l’insertion de ces enseignants. Nous avons choisi comme cadre de référence l’insertion professionnelle considérée comme processus multidimensionnel, cadre qui intègre les concepts de « trajectoire personnelle » et d’itinéraire, c’est-à-dire l’ensemble des événements successifs ponctuant un parcours (Gaudet, 2013). Nous présentons d’abord le concept d’insertion professionnelle et ses dimensions pour ensuite définir celui de trajectoire.

Le concept d’insertion professionnelle

L’insertion professionnelle est le processus par lequel un débutant cherche à s’intégrer dans sa profession, passant de la survie à la maîtrise progressive de cette profession (Mukamurera, Tardif, Niyubahwe et Lakhal, 2020). Les difficultés d’insertion en enseignement rendent difficile toute précision quant à la durée de ce processus, surtout pour les enseignants issus des minorités visibles, qui connaissent davantage de difficultés (Jabouin, 2018). Il demeure que les cinq premières années sont cruciales pour permettre au débutant de s’affranchir et de se tailler une place dans sa profession (Kidd, Brown et Fitzallen, 2015).

Dans notre étude, l’insertion professionnelle ne renvoie pas simplement à l’intégration en emploi, mais elle est plutôt considérée comme un processus qui inclut cinq dimensions interdépendantes : outre l’insertion en emploi, l’affectation spécifique et les conditions de la tâche, la socialisation organisationnelle, la professionnalité et la dimension personnelle et psychologique (Mukamurera, 2018). Selon Mukamurera (2018), la dimension d’insertion en emploi constitue le point de départ de l’expérience professionnelle du nouvel enseignant sur le marché du travail. La dimension de l’affectation spécifique et des conditions de la tâche porte sur la nature, les composantes et l’organisation de la tâche ainsi que sur les conditions de travail comme facteurs favorisant (ou non) l’insertion du débutant. La socialisation organisationnelle porte sur l’intégration en milieu de travail et sur l’adaptation à la culture du milieu organisationnel : l’intégration organisationnelle permet au novice de prendre sa place pour bien fonctionner dans son milieu et dans sa profession. La professionnalité est en lien avec l’adaptation aux différents rôles de la profession. Enfin, la dimension personnelle et psychologique renvoie aux aspects affectifs et émotionnels de l’insertion et à la croissance personnelle, par exemple le développement de la confiance et de la résilience. En somme, l’insertion professionnelle comme processus multidimensionnel permet au nouvel enseignant issu d’une minorité visible de s’adapter à son milieu professionnel, de développer ses compétences et de s’insérer pleinement dans sa profession. Elle repose ainsi autant sur ses conditions de travail et d’adaptation aux rôles professionnels que sur son bien-être psychologique et émotionnel.

Les trajectoires d’insertion professionnelle

Les trajectoires d’insertion professionnelle renvoient à « des séquences de positions professionnelles caractérisées par des niveaux de salaire, de conditions de travail, de pouvoir et de prestige » (Widmer, Ritschard et Müller, 2009, p. 210). Notre étude sur l’insertion des nouveaux enseignants originaires des Caraïbes et d’Afrique subsaharienne intègre la notion de trajectoire professionnelle, c’est-à-dire l’ensemble des événements successifs ponctuant leur parcours professionnel (Gaudet, 2013). L’objectif n’est pas de savoir si une personne est insérée ou non mais d’analyser les itinéraires professionnels de chaque participant. Les trajectoires d’insertion professionnelle correspondent au cheminement, aux étapes clés et aux « épiphanies » vécues par les répondants au cours de leurs cinq premières années d’enseignement (Jabouin, 2018). Elles forment un ensemble de phases traversées par l’enseignant, depuis son entrée dans la profession jusqu’à l’obtention d’un emploi régulier à temps plein (Jabouin et Duchesne, 2018).

La typologie des trajectoires d’insertion professionnelle

Dans le but de repérer les conditions de parcours des participants, leur durée relative et leur enchaînement, une adaptation de la typologie des trajectoires d’insertion de Fournier, Pelletier et Beaucher (2002) a été retenue. Ce modèle adapté constitue un cadre fort d’analyse, avec quatre types d’insertion professionnelle et onze trajectoires associées. Le premier type d’insertion est l’« insertion réussie », qui regroupe les trajectoires « progressive », « traditionnelle » et « pragmatique ». La trajectoire progressive favorise une progression graduelle vers la réalisation du projet professionnel des répondants. Au bout de cinq ans, ils ont le sentiment d’avoir acquis une expérience valable. La trajectoire traditionnelle se distingue par un parcours plus linéaire et prévisible. Dès la sortie de la formation, le débutant obtient un emploi temporaire puis, dans les années suivantes, des postes de suppléance pouvant conduire à un emploi régulier à temps partiel. La trajectoire pragmatique est celle dles répondants qui vivent une période de transition marquée par l’incertitude et l’instabilité durant leurs cinq premières années dans la profession.

L’« insertion sinueuse », pour sa part, compte les trajectoires « relationnelle » et « entrepreneuriale ». Dans une trajectoire relationnelle, les participants expérimentent des périodes sans emploi. Ils sont parfois sous-employés, une situation qui les oblige à occuper plusieurs emplois précaires liés de façon aléatoire à leur profession. Une trajectoire entrepreneuriale permet aux répondants de travailler à leur compte ou de créer leur propre entreprise, après une période d’insertion houleuse où ils remettent en question leur statut de professionnel enseignant.

Le troisième type est l’« insertion essoufflante », qui regroupe les trajectoires « économique » et « moratoire ». Les répondants occupent un emploi stable qui n’est pas en lien avec leur profession. Cet emploi est jugé insatisfaisant, notamment en ce qui concerne les tâches à accomplir, qui requièrent la plupart du temps un niveau de qualification plus bas que le leur (Fournier, Pelletier et Beaucher, 2002). Les participants de la trajectoire économique sont caractérisés par un besoin impératif d’obtenir un poste régulier à temps plein pour atteindre une autonomie financière et bénéficier des avantages sociaux qui correspondent à la profession. Les participants qui font partie d’une trajectoire moratoire, quant à eux, sont employés de manière récurrente (Fournier, Pelletier et Beaucher, 2002) mais ils font surtout de la suppléance à la journée.

Finalement, l’« insertion chaotique » constitue un quatrième type, formé des trajectoires « précaire », « d’exclusion » et « exploratoire ». La trajectoire précaire désigne le fait pour le répondant de ne pas faire l’expérience d’une progression dans son insertion dans les cinq premières années depuis la sortie de sa formation initiale. La trajectoire d’exclusion regroupe les répondants qui connaissent une suite de difficultés souvent liées à des conditions structurelles d’insertion devant lesquelles ils se trouvent démunis (Fournier, Pelletier et Beaucher, 2002). Enfin, les répondants peuvent expérimenter une trajectoire exploratoire : c’est le lot des enseignants issus des minorités visibles noires qui ont suivi le programme de formation à l’enseignement mais qui n’ont pas pu obtenir le certificat de qualification de l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario (OEEO). Ce groupe ne fait pas partie des critères d’admissibilité pour notre étude, dans la mesure où il n’est pas lié directement au processus d’insertion en enseignement.

Méthodologie

Cet article prend appui sur les résultats d’une étude qualitative et adopte une méthodologie narrative (Audet et Mercier, 2004; Bertaux, 2013; Cornils et Schernus, 2007; Savoie-Zajc, 2013) sur les trajectoires d’insertion des nouveaux enseignants originaires des Caraïbes et d’Afrique subsaharienne. L’échantillon était composé de huit répondants, soit six hommes et deux femmes, dans leurs cinq premières années de profession enseignante dans les écoles francophones en Ontario. Le tableau 1 présente les profils sociodémographiques de ces répondants ainsi que leur nombre d’années d’enseignement cumulées dans un autre pays et en Ontario.

Tableau 1

Profils sociodémographiques et professionnels des participants

Profils sociodémographiques et professionnels des participants

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Les critères de sélection des participants

Les participants ont été sélectionnés en tenant compte des critères suivants : 1) être une personne née dans les Caraïbes ou en Afrique subsaharienne, 2) détenir une expérience (ou non) d’enseignement avant de s’établir au Canada, 3) avoir le statut d’immigrant reçu, de résident permanent ou de citoyen canadien, 4) être diplômé d’un programme francophone de formation à l’enseignement de l’Ontario, 5) être en train de vivre un processus d’insertion dans la profession enseignante dans l’est de l’Ontario francophone et avoir terminé sa formation à l’enseignement depuis cinq ans ou moins (Jabouin, 2018). L’échantillon a été constitué avec l’aide de deux organisations communautaires : le FESHOG, une association à but non lucratif regroupant des organismes de la communauté des Haïtiens vivant à Ottawa et à Gatineau, et la CEPAP qui, pour sa part, est une association d’enseignants de minorités visibles francophones établie à Ottawa.

L’analyse a été effectuée à partir de données qualitatives recueillies en 2016 et 2017 par l’entremise d’entrevues narratives semi-dirigées d’environ 90 minutes chacune et portant sur les trajectoires des répondants. L’analyse de contenu thématique a été effectuée en adaptant le modèle de Fournier, Pelletier et Beaucher (2002). Ce modèle a permis de respecter la voix des participants lors de la construction de leur récit d’expérience. Le logiciel NVivo 10 a facilité la codification, la réduction des données et l’identification des extraits correspondant à une catégorie, de même que les relations entre les données.

Cette étude est susceptible d’offrir certains biais mentionnés par Poupart et al. (1997) : biais relatifs aux éléments de mise en scène, biais liés au contexte de l’étude et à ses répercussions sur les récits des participants et biais dus à la relation entre participant et chercheur et à leur situation sociale respective. En vue de minimiser ces biais, un guide d’entrevue avec des questions claires et compréhensibles a été rédigé pour les deux premières catégories de biais. Pour la troisième catégorie, la meilleure façon d’y parvenir a été de contrôler nos propos durant les entrevues et de rester lucide face à nos préjugés sur l’objet d’étude, même après les entrevues.

Présentation des résultats

Les données recueillies ont permis de dégager les thèmes suivants : 1) l’influence de l’origine ethnoculturelle sur la recherche d’emploi et les stratégies d’enseignement, 2) les trajectoires d’insertion professionnelle des nouveaux enseignants originaires des Caraïbes et d’Afrique subsaharienne, 3) la relation d’identité culturelle entre les enseignants issus des minorités visibles et les élèves issus de l’immigration et 4) la valeur ajoutée des enseignants issus des minorités visibles.

L’influence de l’origine ethnoculturelle sur l’emploi et les stratégies d’enseignement

Il a été demandé aux participants de « raconter si le fait d’être enseignant de race noire a un impact sur sa recherche d’emploi ou dans sa stratégie d’enseignement ». Les réponses de ces enseignants immigrants sont plutôt mitigées. Pour Richard, son statut d’enseignant immigrant noir n’a pas une grande influence sur sa stratégie d’enseignement, mais bien sur sa recherche d’emploi puisque, dit-il : « j’ai fait les démarches, j’ai suivi toutes les étapes qu’on me demande de suivre, mais rien ne marche. Tandis que les autres, qui sont Canadiens blancs, suivent les mêmes étapes que moi, ils réussissent. » Charles présume que son origine influence négativement son processus d’embauche puisque la majorité des enseignants qui font de la suppléance proviennent d’une minorité visible noire. Il mentionne que : « quand je regarde la liste des enseignants suppléants, soit au conseil [scolaire] A, soit au conseil B, assez curieusement, je me suis rendu compte que la majorité, soit environ 95 % des suppléants, sont des enseignants issus des minorités visibles ». Il conclut en disant que : « Personne ne dira officiellement que c’est à cause de l’âge ou de l’origine qu’on n’embauche pas un enseignant ». De plus, ces enseignants ont rapporté qu’ils ont mis de l’avant certaines stratégies d’enseignement leur permettant de s’insérer en enseignement. Par exemple, Stéphane dit avoir développé des stratégies comme celle de « prendre quelques minutes au début de la classe pour raconter des anecdotes pour établir un climat propice à l’apprentissage ». Comme conteur, Stéphane raconte des histoires qui découlent de son imaginaire et par conséquent qui pourraient provenir de son expérience antérieure ou de sa culture d’origine. Pierrot raconte qu’il a recouru au folklore haïtien à travers les chants, la musique, les contes, les danses avec du tam-tam ou du tambour pour établir une cohésion sociale et culturelle ainsi que la création de relations avec les élèves. Il le rapporte ainsi : « J’ai dû mettre l’expérience que j’ai eue avant, j’ai dû être créatif, ludique, utiliser des jeux, des danses, utiliser des chansons folkloriques, utiliser tout ce que je pouvais utiliser parce que moi, j’ai de l’expérience avec les jeunes ». En plus des activités qui concourent à l’établissement d’une relation harmonieuse avec les élèves, il prône la créativité et les jeux pour maintenir un bon climat de classe avec ces derniers. Cependant, qu’il s’agisse ou non d’excellentes stratégies en situation d’intervention ethnoculturelle, rien ne peut assurer que l’insertion de ces enseignants sera fructueuse, dans la mesure où l’insertion est multidimensionnelle et où elle ne se limite pas seulement à l’exercice du rôle professionnel.

Les trajectoires d’insertion professionnelle des nouveaux enseignants originaires des Caraïbes et d’Afrique subsaharienne

Concernant les trajectoires d’insertion professionnelle des nouveaux enseignants originaires des Caraïbes et d’Afrique subsaharienne, l’analyse des données a permis de dégager trois types d’insertion sur les quatre relevés par Fournier, Pelletier et Beaucher (2002), soit les insertions professionnelles réussie, sinueuse et chaotique. Cela a aussi guidé l’exploration de quatre trajectoires se rapportant aux trois types d’insertion précités : il s’agit des trajectoires progressive, traditionnelle, relationnelle et précaire.

Les trajectoires progressive et traditionnelle de l’insertion professionnelle réussie

Selon le modèle adapté de Fournier, Pelletier et Beaucher (2002), Pierrot s’est situé dans une insertion professionnelle réussie à trajectoire progressive. Selon lui, son appartenance à une minorité visible noire n’a pas posé trop de barrières à son insertion en comparaison de tout ce qu’il a témoigné avoir entendu. À son avis, il a été chanceux de n’avoir expérimenté aucune « situation probante de discrimination ». Il s’exprime ainsi :

En tant qu’enseignant de race noire, j’ai été bien accueilli; j’ai eu probablement de la chance…Une situation qui pourrait me bouleverser, c’est une situation de racisme, de discrimination. Heureusement, je n’ai pas vécu une situation probante de discrimination.

Son récit semble illustrer la présence de résilience, ce qui l’aide à briser les obstacles susceptibles de l’empêcher d’obtenir un poste régulier. Il croit qu’il est vital de garder le calme par rapport à certains propos et de savoir dépasser les clivages. Il affirme qu’« en tant qu’enseignant issu de l’immigration, il faut savoir briser les barrières, […] il faut aller au-delà, il faut dépasser tout ce clivage. Il faut être ouvert d’esprit et prêt à s’intégrer progressivement ». En somme, Pierrot croit que les stratégies professionnelles qu’il a mises de l’avant lui ont été favorables pour s’insérer dans la profession. À son avis, son insertion crée une forme de multiculturalisme, puisqu’il est capable de transmettre sa culture d’origine tout en étant ouvert à apprendre des autres :

Je me sens inséré dans la profession enseignante parce que je peux me montrer utile à la société. Je peux agir en professionnel. Le reste viendra au fur et à mesure parce que c’est l’impact que j’ai eu sur les élèves qui importe le plus.

De plus, il a perçu son insertion comme un engagement utile à la société, lui permettant d’agir en professionnel. Il croit que son insertion repose sur l’impact positif qu’il peut avoir sur les élèves. À ce sujet, voici ses propos : « Mon insertion professionnelle crée aussi une sorte de multiculturalisme parce que j’ai transmis ma culture comme j’ai aussi appris d’autres cultures, car dans ma classe, il y a d’autres nationalités, des enfants qui viennent de cultures différentes ». Donc, pour Pierrot, son insertion professionnelle favorise un enrichissement mutuel en enseignement à travers le multiculturalisme. En transmettant les valeurs professionnelles liées à sa culture et en apprenant de celles des élèves, il peut expérimenter un échange culturel dynamique au sein de la classe.

Matthieu illustre une insertion professionnelle réussie de trajectoire traditionnelle selon le modèle de Fournier, Pelletier et Beaucher (2002). Il exprime sa flexibilité quant à son lieu de travail dans le but d’obtenir un poste régulier. Son récit témoigne de sa détermination et de son engagement pour s’insérer dans la profession enseignante. À ce sujet, il déclare :

Dans mes choix, j’avais dit n’avoir aucun problème d’aller en périphérie d’Ottawa. J’ai participé aux sélections du conseil B. Après mon entrevue de sélection générale, le conseil B m’a appelé pour une deuxième entrevue de sélection pour travailler à cent cinquante kilomètres de mon domicile. C’est ainsi qu’en février 2012, j’ai été embauché par le conseil B comme suppléant à long terme. Ce poste allait devenir permanent au mois d’août 2012.

Selon l’avis de Matthieu, l’obtention de ce poste régulier est le fruit de l’adoption d’attitudes professionnelles d’ouverture et de résilience. Malgré ses débuts difficiles, il s’adapte et il développe des stratégies lui permettant d’obtenir un contrat de suppléance à long terme pour ensuite décrocher un emploi régulier. Sa décision d’accepter de travailler loin en périphérie d’Ottawa a contribué favorablement à son insertion réussie.

Le type d’insertion sinueuse de trajectoire relationnelle

Le récit d’expérience de Charles reflète une trajectoire relationnelle d’insertion sinueuse. Il a présenté une expérience d’insertion professionnelle parsemée d’obstacles, notamment des débuts difficiles et des périodes de chômage. Sa trajectoire professionnelle s’inscrit dans une dynamique relationnelle où il a utilisé son réseau professionnel et syndical pour faciliter son insertion professionnelle. Il rapporte qu’il a eu le courage de soumettre un « grief à l’Association des enseignants franco-ontariens pour dénoncer les irrégularités rencontrées. J’ai demandé à l’AEFO d’assumer cette charge immédiatement et de faire quelque chose puisque le processus d’embauche n’avait pas été respecté ». Charles croit que la réussite de son insertion dans la profession enseignante est le résultat de son engagement et de sa persévérance, comme il en témoigne : « J’ai eu foi en l’avenir. Je suis resté fidèle à cet objectif que je me suis fixé [d’obtenir un poste régulier] ». Selon lui, la discrimination à l’embauche est l’une des difficultés cruciales auxquelles les enseignants de la migration noire font face lors de leur insertion. Selon Charles, le choix de faire preuve de « professionnalisme en tant qu’enseignant » et de « prendre [son] mal en patience » permet d’éviter certains obstacles lors du processus d’insertion. Son expérience d’insertion semble souligner l’importance de construire et de préserver des relations de réseautage pour s’insérer dans la profession enseignante.

La trajectoire précaire d’une insertion professionnelle chaotique

Stéphane, Marie, Richard et Marlène ont vécu une insertion professionnelle chaotique de trajectoire précaire. Pour Stéphane, l’origine ethnoculturelle est un facteur crucial qui l’empêche d’obtenir un emploi régulier en enseignement, comparativement aux enseignants natifs. Selon lui, il y a lors du processus d’embauche « deux poids, deux mesures » entre les enseignants natifs et ceux de minorité visible noire. Stéphane trouve qu’« être enseignant de minorité visible de race noire n’est pas facile » quant à la possibilité de s’insérer dans les écoles francophones de l’Ontario. Sans partager forcément l’avis de Stéphane, d’autres répondants considèrent qu’être enseignant de la migration noire est un obstacle déterminant lors du processus d’embauche. Pour Richard, « on donne la priorité aux Canadiens d’origine et puis, s’il y a de la chance, on prend les autres [enseignants immigrants noirs]. » Stéphane, nous a fait part de cette même perception lorsqu’il a évoqué le manque de respect du processus d’embauche pour parler de sa difficile insertion et de son sentiment de rejet lié à son origine ethnoculturelle : « Les employeurs ne respectent pas toujours le processus d’embauche. C’est de la tricherie. Il y a discrimination dans le processus d’embauche. Il ne faut pas faire comme si cela n’existait pas dans les écoles francophones en Ontario ». Il insiste sur le fait qu’il a été évalué sur les signes de son origine culturelle plutôt que sur ses compétences professionnelles.

Marie raconte qu’elle avait de « la difficulté pour trouver des matériels didactiques pour [son] enseignement. À la bibliothèque, on m’a fait savoir que l’enseignant du groupe précédent n’avait pas encore remis les exemplaires en sa possession pour les distribuer à mon groupe ». Selon ses propos, le bibliothécaire pouvait obtenir la restitution des livres, vu qu’il était la personne responsable de faire la requête auprès de l’enseignant qui détenait les livres. Elle déclare : « J’ai été très stressée puisque c’était la première fois que j’allais prendre la charge d’une classe pour un contrat de suppléance à long terme. J’étais vraiment déboussolée. J’avais à faire de la gestion de la discipline dans deux classes avec des élèves en difficulté ». Il en est de même pour Marlène, qui a vécu une expérience similaire à celle de Marie. Elle a décidé de présenter la situation à la direction d’école. L’extrait suivant montre qu’elle a eu l’impression que son chef de secteur avait choisi de plein gré de ne pas lui fournir le matériel en question :

Finalement, j’ai décidé d’envoyer un courriel à la direction. Deux heures plus tard, un autre enseignant est venu au laboratoire de ce secteur d’enseignement, a ouvert une armoire et à l’intérieur, il y avait tout le matériel dont j’avais besoin. Il y en avait même du tout neuf, jamais encore utilisé.

Bref, selon ses propos, la décision de restreindre l’accès des nouveaux enseignants aux ressources pédagogiques est un facteur pouvant nuire à la réussite de leur insertion professionnelle, car l’efficacité de l’enseignant est étroitement liée au fait d’être bien informé sur le contexte scolaire et repose également sur l’accès aux ressources pédagogiques. Une telle situation crée des écarts et perturbe la relation professionnelle, censée être basée sur la confiance entre les enseignants natifs et ceux issus de la migration.

La relation d’identité culturelle entre les enseignants issus des minorités visibles et les élèves issus de l’immigration

Lors de la livraison des récits, les nouveaux enseignants originaires des Caraïbes et d’Afrique subsaharienne ont parlé des élèves issus de l’immigration sans préciser s’il s’agissait d’enfants nés à l’étranger (1e génération), d’enfants nés dans le pays d’accueil dont un des parents était né dans un autre pays (2e génération) ou d’enfants du pays d’accueil de parents natifs du pays d’accueil (3e génération). Ainsi, les propos liant des élèves de parents issus de la migration ne se réduisent pas au statut de génération (Niyubahwe, Mukamurera et Jutras, 2019). Les apports potentiels de ces enseignants profitent à tous les enfants issus de la migration, peu importe la génération, et leur rôle de modèle d’identité ou de réussite profite également à tous.

Pour parler de relation d’identité culturelle, Pierrot décrit une situation où des élèves issus de minorités se sont identifiés à lui et ont pris sa défense face à des propos tenus par des élèves natifs en salle de classe. Lors de cet événement, Pierrot n’ayant pas réagi, certains élèves issus de la diversité ont pris l’initiative d’aviser la direction de la situation.

Pierrot rapporte ainsi les faits :

Les élèves de couleur qui voient qu’ils s’identifient avec moi […] sont venus me voir pour me dire ce que tel groupe d’élèves a dit sur moi. Pour eux, ils pensaient que je devais réagir […]. Et eux autres [les élèves de couleur] voient que je n’ai pas réagi, [et sont allés rapporter les propos des élèves natifs à la direction]. Ce n’est qu’après une discussion des élèves de couleur avec la direction [que] les autres élèves sont venus s’excuser.

Ce récit met en lumière la dynamique de relation identitaire et de perception entre les élèves issus de l’immigration et l’enseignant immigrant. Luc atteste que plusieurs élèves issus de la migration ont la perception que les enseignants des minorités visibles sont généralement affectés à la suppléance. Il rapporte avoir un impact sur ces élèves, mais cet impact demeure tributaire de sa réussite ou de sa difficulté à s’insérer dans la profession enseignante. À son avis, les élèves racisés ne le regardent pas seulement dans une relation d’apprenant et de formateur mais également comme un modèle socioculturel à suivre, comme il le décrit :

Je suis certain, en tant qu’enseignant immigrant, que j’ai un impact sur les élèves immigrants. Comme la majorité des enseignants suppléants sont des immigrants et pour plusieurs années encore, les élèves immigrants semblent penser qu’il est normal pour un enseignant immigrant d’être enseignant suppléant. C’est leur perception. Cela n’encourage pas l’élève immigrant à devenir enseignant.

Comme modèle de réussite, Luc soutient que la présence d’enseignants immigrants comme enseignants titulaires pourrait aider à transformer la perception des élèves de la migration quant à leur propre avenir et ainsi contribuer à leur réussite. À ce sujet, il dit : « Voir un enseignant immigrant qui enseigne comme titulaire, cela pourrait changer la perception qu’ont les élèves immigrants. En général, ces élèves voient bien que les suppléants blancs ne feront cela que durant un an ». Luc, dans ses propos, met en évidence la pertinence de la représentation de la diversité ethnoculturelle dans la profession enseignante. Selon lui, le fait pour les élèves de voir un enseignant issu des minorités visibles occuper un emploi stable est susceptible de renforcer leur sentiment d’appartenance à leur communauté respective.

Valeur ajoutée de l’enseignant issu de l’immigration de minorité visible noire

Luc exprime l’idée qu’on s’insère mieux dans une école où il y a d’autres personnes issues de la diversité. Cela constitue selon lui une valeur ajoutée, dans une perspective d’engagement dans un milieu où la diversité culturelle s’enrichit mutuellement.

Il considère que « l’insertion, c’est d’être intégré dans une école multiculturelle. Voilà une autre raison pour laquelle j’ai choisi l’école où je suis maintenant : faire partie d’une école, comme on dit ici, beaucoup plus multiculturelle, là où je me retrouve ». À son avis, le fait d’enseigner dans une école où la présence des gens de couleur est significative lui procure un sentiment d’intégration, de relation de proximité culturelle, ce qui lui est vital pour se sentir appartenir à la profession et bien inséré. Selon lui, son engagement à travailler dans un contexte multiculturel va lui permettre d’adapter son enseignement aux besoins de tous les élèves, particulièrement ceux de l’immigration, en tenant compte de leurs difficultés et de leur processus d’apprentissage. Pour Matthieu, sa valeur ajoutée est le fait d’enseigner le français dans un pays autre que le sien : « En arrivant en Ontario, j’ai trouvé une opportunité : c’est enseignant de français. Or c’est ça que j’aime. » Matthieu considère le fait d’être enseignant titulaire en Ontario comme une opportunité, dans un contexte où il est difficile pour les enseignants issus des minorités visibles de s’insérer dans la profession enseignante. Cette opportunité, selon son dire, se traduit par une satisfaction à pouvoir enseigner en français.

Discussion

Des enseignants de la migration de minorité visible noire ont livré le récit de leur expérience de trajectoire professionnelle dans les écoles francophones de l’est l’Ontario. Ils ont signalé l’impact que leur insertion pourrait avoir sur les élèves en général, et plus spécifiquement sur ceux dont les parents sont issus de la migration. Certains enseignants de ce groupe considèrent que leur insertion réussie est une ressource pertinente et une valeur ajoutée cruciale pour les élèves. L’analyse des données émergentes de ces récits permet de formuler un constat quant aux conditions susceptibles d’avoir un impact sur la réussite des élèves issus de parents de la migration.

Le plurilinguisme comme ressource au soutien à la réussite des élèves de la migration

Les données recueillies auprès des participants ont mis en évidence plusieurs stratégies utilisées pour faciliter leur insertion en enseignement. Certaines de ces stratégies, comme le fait de mimer une danse folklorique, de jouer du tambour du pays d’origine ou de raconter des anecdotes culturelles, font appel à des compétences langagières de leur culture d’origine. Ainsi, dans une perspective d’équité et d’école inclusive, la valorisation et la mise en pratique d’une approche plurilingue dans les écoles offriraient un atout dans la réussite des élèves de la migration (Bauer, Borri-Anadon et Ngoenha, 2019). Certains auteurs pensent en effet que le plurilinguisme facilite l’apprentissage, notamment l’acquisition d’autres langues (Bauer, Borri-Anadon et Ngoenha, 2019). Le Commissariat aux services en français de l’Ontario, dans son rapport de 2018, soutient que l’aptitude à parler plusieurs langues est un atout dans la distribution des biens, le commerce et la richesse au Canada (Goucher et Mainville, 2018). En lien avec la pédagogie culturelle (MEO, 2009), le plurilinguisme des enseignants de la diversité offre une valeur ajoutée immédiate pouvant favoriser la réussite des élèves issus de la diversité. Il pourrait même contribuer à réduire la discrimination sur des motifs linguistiques (Bauer, Borri-Anadon et Ngoenha, 2019).

Dans une vision d’inclusion des élèves issus de parents de la migration (Gérin-Lajoie, 2020), l’approche plurilingue pourrait ainsi renforcer le mandat de l’école francophone en milieu minoritaire, en considérant l’enseignant comme un passeur culturel. Cette visée valorise en effet l’apport de l’enseignant issu d’une minorité visible comme passeur culturel plurilingue et en fait un médiateur immédiat qui guide l’élève dans un voyage de sa culture d’origine vers la culture d’accueil, afin d’aller plus loin dans son domaine pédagogique (Sorin, Pouliot et Marcoin, 2007). Par conséquent, la mise en valeur du potentiel pédagogique spécifique des enseignants issus des minorités visibles peut aider à bâtir des ponts entre la réalité des élèves issus de parents immigrants et leur apprentissage (Jabouin, 2018; Villegas et Irvine, 2010). De plus, il serait souhaitable de soutenir les enseignants de minorités visibles dans leur rôle de piliers de réussite d’une école inclusive.

Amrein-Beardsley (2008) et Kurtz (2018) ont révélé que la valeur ajoutée de l’enseignant affecte d’une façon indéniable la performance et le rendement scolaire de tous les élèves, et particulièrement des élèves en difficulté. L’effet de la valeur ajoutée de l’insertion des enseignants de la migration permet plus spécifiquement de mobiliser la culture d’origine de l’élève, de partager un même bagage culturel, d’aider à pallier le choc culturel du pays d’accueil, de combler la perte de repères organisationnels et de promouvoir l’apprentissage des élèves racisés grâce une approche plurilingue (Bauer, Borri-Anadon et Ngoenha, 2019; Jabouin, 2018).

L’effet du contexte ethnoculturel dans la relation entre enseignant et élève

Si certaines conditions ont été mentionnées par des enseignants de la migration noire comme déterminantes dans la réussite de leur insertion professionnelle, l’origine ethnoculturelle a aussi constitué l’un des facteurs néfastes dans ce processus. De plus, la majorité d’entre eux considèrent qu’il ne suffit pas d’obtenir un poste régulier, mais qu’il faut également pouvoir travailler dans un milieu qui jouit d’une bonne compréhension des mécanismes culturels et de leur impact sur la réussite des élèves. Dans ce contexte, la valeur ajoutée de l’enseignant de la migration est alors un élément efficace dans l’aide à la compréhension des dimensions culturelle et linguistique de l’élève issu de parents de la migration et elle favorise la mobilisation vers la réussite. L’effet de contexte ethnoculturel offre ainsi un stimulant positif qui soutient la réussite des élèves issus de l’immigration, avec la mise de l’avant d’un programme plus inclusif, car l’enseignant issu de l’immigration est intéressé par les origines culturelles des élèves et mobilise de l’énergie pour motiver ces derniers en offrant une perspective multiculturelle (McDermott, Rothenberg et Gormley, 1998; Niyubahwe, Mukamurera et Jutras, 2019). Ainisi, la relation entre enseignant et élève en contexte multiculturel a non seulement un impact positif grâce à la représentation des enseignants issus de minorités visibles et grâce au processus d’inclusion mais aussi un effet marqué plus spéficique, en matière de persévérance et de résilience, sur la réussite des élèves d’origines ethniques diverses (Cinéus, 2020; Kanouté, Laaroussi, Rachédi et Doffouchi, 2008).

Conclusion

En conclusion, même si notre étude ne comportait pas de question spécifique sur l’impact des enseignants immigrants de minorité visible noire sur la réussite scolaire des élèves racisés, quatre des huit répondants ont mentionné dans leur récit leur influence sur ce groupe d’élèves lors de leur trajectoire d’insertion professionnelle. Les données émergentes ont permis de mettre en lumière la pertinence sociale qui découle de l’impact que ce groupe d’enseignants peut avoir sur la réussite des élèves, grâce à une approche plurilingue et une attitude d’ouverture. Une relation professionnelle inclusive pourrait donc favoriser la réussite des élèves issus des parents de la migration. Toutefois, à notre connaissance, aucune étude n’a été faite antérieurement en Ontario spécialement auprès des enseignants immigrants issus d’une minorité visible noire afin de cerner leurs impacts et leurs apports dans la réussite des élèves issus des parents de la migration. Or il semble exister une corrélation entre le processus d’insertion professionnelle des enseignants et leur capacité à soutenir la réussite des élèves. Malheureusement, notre échantillon ne nous permet pas d’établir de lignes claires expliquant le lien entre la réussite de l’insertion des enseignants issus des Caraïbes et d’Afrique subsaharienne et la réussite des élèves issus de ces groupes. Toutefois, on peut noter que les enseignants immigrants des minorités visibles sont susceptibles de servir de modèles inspirants pour les élèves de même origine, en renforçant leur motivation scolaire. À l’inverse, on peut également noter que ces enseignants risquent de porter une charge symbolique lourde lorsqu’ils apparaissent comme relevant d’une communauté sous-représentée ou dévalorisée.