Résumés
Résumé
Cet article propose de revisiter le rapport du Canada français à la Grande Guerre à travers l’étude d’un témoignage singulier : celui du journaliste Paul Caron, enrôlé dans la légion étrangère en 1914. Anti-impérialiste affiché, le légionnaire a produit une série de lettres du front que l’on retrouve sous forme de chroniques dans Le Devoir et dans Le Peuple de Montmagny entre 1914 et 1917. En se mettant lui-même dans la peau d’un poilu canadien-français, l’auteur propose un récit cathartique qui reflète davantage l’ambivalence de ses semblables face au conflit en cours que le refus d’y participer. À cet égard, ses écrits nous renseignent peut-être moins sur la guerre elle-même que sur le défi d’en rendre compte — que laisser transpirer de l’horreur des tranchées? — tout en respectant l’horizon d’attente de ses lecteurs, notamment des nationalistes — quelle guerre leur raconter? Caron produit ainsi un artefact qui, au-delà des faits rapportés, révèle le poids et la complexité du cadre de référence culturel à travers lequel lui et ses contemporains, tant anglo que franco-canadiens, tentent de donner un sens à la guerre.
Abstract
This article re-examines French Canada’s relationship with the Great War through a particular account: that of the journalist Paul Caron who enrolled in the Foreign Legion in 1914. A well-known anti-imperialist, the legionnaire wrote a series of letters from the front that were published in columns of the newspapers Le Devoir and Le Peuple de Montmagny between 1914 and 1917. By assuming the character of a French-Canadian “poilu”, the author offers a cathartic account which underlines the ambivalence of his fellow French-Canadians towards the ongoing conflict, rather than their refusal to participate in it. In this respect, his writings tell us less about the war than they do about the challenge to report it — what part of the horrors of the trenches to disclose? — all the while trying to respect his readers’ expectations, particularly those of the nationalists — what war to tell? More than a mere factual report, the artefact produced by Caron reveals the burden and complexities of the cultural framework by which he and his contemporaries, whether they be English or French-Canadians, try to make sense of the war.