EN :

Beginning in the early 2000s, policies and legislation aimed at financial inclusion drew millions of low-income Brazilians into the banking system for the first time. When many of these consumers were unable to keep up with credit card payments, they acquired a “dirty name”—the common expression in Brazil for default. An analysis of the historical origins and current use of this expression shows how it operates as a technology of racialization that legitimates forms of expropriation under financial capitalism. Drawing upon longstanding associations between Blackness and dirt in Brazil, the expression “dirty name” naturalizes inequalities while erasing alternative financial practices and relations in Brazil’s urban peripheries.

FR :

Au début des années 2000, les politiques et la législation visant à l’inclusion financière ont attiré dans le système bancaire, pour la première fois, des millions de Brésiliens à faibles revenus. Quand beaucoup de ces consommateurs n’ont plus été en mesure de rembourser leurs cartes de crédit, ils ont acquis un « nom sale », l’expression courante au Brésil pour désigner le défaut de paiement. En analysant les origines historiques de cette expression et son utilisation actuelle, on constate qu’elle fonctionne comme une technologie de racialisation qui légitime des formes d’expropriation dans le système du capitalisme financier. L’expression « nom sale », qui s’appuie sur des associations de longue date entre la noirceur et la saleté au Brésil, naturalise les inégalités tout en effaçant les pratiques et les relations financières alternatives dans les périphéries urbaines brésiliennes.

EN :

Indigenous Bolivians, especially women, are climbing the ranks of global multilevel marketing (MLM) companies like Herbalife, Omnilife, and Hinode, seeking to join Bolivia’s purportedly rising Indigenous middle class. Through MLMs, Indigenous direct sales distributors pursue a dignified life materialized in better homes, smart dressing, international travel, and the respect they receive at recruitment events. In their recruitment and sales pitches to potential buyers and downline vendors, Indigenous distributors fashion testimonials about their successes that explicitly critique existing avenues of class mobility and their racialization in two ways. First, these testimonials counter the skepticism that multilevel marketing companies face by citing a litany of false promises offered by higher education, salaried employment, and public sector jobs—avenues long heralded as the stepping stones to entwined racial and class mobility in Bolivia. They further voice their frustrations with perceived status hierarchies and organizational barriers among Indigenous merchants, highlighting their own sense of alienation from the connections and protections that have enabled the financial success of other Indigenous entrepreneurs. Second, while lodging these critiques, distributors repurpose racialization toward their own recruitment ends. As MLM distributors pursue their visions of the good life, the testimonials that Indigenous MLM recruiters craft to enable their ascent expose, rely on, and rework the bounds of racial capitalism. Ultimately, their critiques reveal how the racial partitioning that enables capitalist extraction operates through the work of direct sales.

FR :

Les Autochtones boliviens, en particulier les femmes, gravissent les échelons des sociétés mondiales de marketing à plusieurs niveaux (MLM) telles que Herbalife, Omnilife et Hinode, cherchant à rejoindre la classe moyenne autochtone bolivienne prétendument en plein essor. Par le biais des MLM, les distributeurs autochtones de vente directe aspirent à une vie digne, matérialisée par de meilleures maisons, des vêtements élégants, des voyages internationaux et le respect qu’ils reçoivent lors des évènements de recrutement. Dans leurs discours de recrutement et de vente aux acheteurs potentiels et aux vendeurs en aval, les distributeurs autochtones mettent en scène des témoignages de leur réussite qui critiquent explicitement les voies existantes de la mobilité de classe et leur racialisation, et ce de deux manières. Tout d’abord, ces témoignages contrecarrent le scepticisme auquel sont confrontées les sociétés de marketing à plusieurs niveaux en citant une litanie de fausses promesses offertes par l’enseignement supérieur, l’emploi salarié et les emplois du secteur public – des domaines longtemps considérés comme les tremplins de la mobilité raciale et de classe en Bolivie. En outre, ils expriment leurs frustrations face aux hiérarchies de statut et aux barrières organisationnelles perçues parmi les commerçants autochtones, soulignant leur propre sentiment de marginalisation par rapport aux relations et aux protections qui ont permis la réussite financière d’autres entrepreneurs autochtones. En second, tout en tenant compte de ces critiques, les distributeurs réaffectent la racialisation à leurs propres fins de recrutement. Alors que les distributeurs de marketing à plusieurs niveaux poursuivent leur vision de la bonne vie, les témoignages que les recruteurs autochtones de marketing à plusieurs niveaux élaborent pour permettre leur ascension exposent les limites du capitalisme racial, s’appuient sur elles et les retravaillent. Finalement, leurs critiques révèlent comment le cloisonnement racial qui permet l’extraction capitaliste opère à travers le travail de la vente directe.

EN :

Chinese residents have grown to be one of the most prosperous migrant groups in Italy since their mass migration from China in the 1980s. Alongside their rapid upward economic mobility, parents and children within the same families have shown generational differences in their understandings of the good life. While older generations believed that the good life means economic mobility, which is achieved through their labour and migration, younger generations’ definition of the good life, rooted in their negative experiences of racialization, is associated with social recognition. Such generational differences stem from the shifting tensions between the contested racial and national orders in association with Italy’s economic stagnation and China’s global ascendancy. Yet, both generations of these desiring subjects have manifested their own conceptions of cosmopolitan Chinese-ness to survive precarity and to aspire to a better life both economically and socially. Their family stories thus contribute to anthropological debates on how people envision their futures between hope and precarity, expectation and uncertainty, and privilege and disadvantages amid racialized class terrains, generational tensions, and geopolitical transformation of the world order.

FR :

Les résidents chinois sont devenus l’un des groupes de migrants les plus prospères d’Italie depuis leur migration massive de Chine dans les années 1980. Les parents et les enfants d’une même famille ont montré des différences générationnelles dans leur compréhension de ce qu’est une vie agréable, parallèlement à leur rapide ascension économique. Alors que les générations plus anciennes pensaient qu’une vie agréable était synonyme de mobilité économique, obtenue grâce à leur travail et à la migration, la définition d’une vie agréable chez les jeunes générations, enracinée dans leurs expériences négatives de racialisation, est associée à la reconnaissance sociale. Ces différences générationnelles résultent des tensions changeantes entre les différentes races et systèmes nationaux contestés, associées à la stagnation économique de l’Italie et à l’ascension mondiale de la Chine. Pourtant, les deux générations de ces sujets aspirants ont manifesté leurs propres conceptions du cosmopolitisme chinois pour survivre à la précarité et aspirer à une vie meilleure, tant sur le plan économique que social. Leurs histoires familiales contribuent ainsi aux débats anthropologiques consacrés à la manière dont les gens envisagent leur avenir entre espoir et précarité, attente et incertitude, et privilèges et désavantages dans un contexte de classes racialisées, de tensions générationnelles et de transformation géopolitique de l’ordre mondial.

EN :

Latinx immigrant-origin youth in Nashville, Tennessee—who are poised to be the first in their families to achieve middle-class status—strive toward a cosmopolitan future of professional work and disposable income. This social and economic mobility is imagined in relation to the racialization and stigmatization of Latinx people as exclusively working-class labourers and as the objects of a Southern, white cosmopolitan gaze. Through their aspirations, youth challenge existing local and global regimes of labour, consumption, and difference. With respect to work, youth seek to remake the white professional world in ways specific to their Latinx experience. In so doing, they reclaim the value of Latinx labour. They also look to engage in specific kinds of material accumulation that, while leading to tangibly more comfortable lives individually, also make their worth visible to others. Finally, youth’s views of a future defined by their ability to cross cultures and borders repositions their ethno-racial and linguistic difference as an asset rather than a liability. Moreover, this global orientation reorients cosmopolitanism away from a position of exclusively white and elite status. Collectively, these imaginings reveal that while middle-class aspirations may reinforce a colour line of class, they also potentially remake existing racialized hierarchies of class, mobility, and cosmopolitanism.

FR :

Les jeunes immigrés latino-américains de Nashville, dans le Tennessee, qui sont sur le point d’être les premiers de leur famille à atteindre la classe moyenne, aspirent à un avenir cosmopolite fait de travail professionnel et de revenus disponibles. Cette mobilité sociale et économique est imaginée en relation avec la racialisation et la stigmatisation des Latino-américains en tant qu’ouvriers exclusifs de la classe ouvrière et en tant qu’objets d’un regard cosmopolite blanc et sudiste. À travers leurs aspirations, les jeunes remettent en question les régimes de travail, de consommation et de différence, à l’échelle locale et mondiale. En ce qui concerne le travail, les jeunes cherchent à remodeler le monde professionnel blanc en fonction de leur expérience latino-américaine. Cela leur permet de revendiquer la valeur du travail latino-américain. Ils cherchent également à s’engager dans des formes spécifiques d’accumulation matérielle qui, tout en menant à des vies matériellement plus confortables pour les individus, rendent également leur valeur visible aux yeux des autres. Enfin, la vision qu’ont les jeunes d’un avenir défini par leur capacité à traverser les cultures et les frontières repositionne leur différence ethno-raciale et linguistique comme un atout plutôt que comme un handicap. En outre, cette orientation mondiale réoriente le cosmopolitisme, qui n’est plus exclusivement blanc et réservé à l’élite. Collectivement, ces imaginations révèlent que si les aspirations de la classe moyenne peuvent renforcer la distinction de classe selon la couleur, elles peuvent aussi remodeler les hiérarchies racialisées existantes de la classe, de la mobilité et du cosmopolitisme.

EN :

Since the 1970s, Southeast Asia women have turned to outward labour migration to Hong Kong to enhance their economic livelihoods. However, while their overseas work afforded the possibility of improved material conditions back home, migrants face an array of ethnic, classed, and gendered subjugations during their temporary placements abroad. Hopeful for futures beyond domestic labour, some migrant workers engage in intimate exchanges with Euro-American expatriate men in Hong Kong’s entertainment district in Wanchai. Indeed, these relations do not entirely offset their ethnic and classed minoritization. But, becoming short-term partners, long-term girlfriends, or eventual wives provide alternative pathways for navigating their disenfranchisement as racialized labourers relegated to the city’s spatial and legal peripheries. Comparably, their expatriate male partners also conveyed their own subjective experiences of dislocation and suffering due to employment redundancy, aging, and past separations. Ethnographic research examining the intimacies forged between these two groups of foreigners in Hong Kong—Southeast Asian migrants seeking better futures, and Euro-American men healing from past employment and emotional traumas—reveal opportunities for expanded aspirational capacities, broadened orientations to the future, and alternative gendered subjectivities. This article explores how the intimacies fostered in Wanchai carve out opportunity to re-envision what might be affectively and materially possible in their futures beyond domestic labour, aging alone, and prolonged economic precarity.

FR :

Depuis les années 1970, les femmes d’Asie du Sud-Est se sont tournées vers l’immigration de la main-d’oeuvre à Hong Kong pour améliorer leurs moyens de subsistance. Toutefois, si leur travail à l’étranger leur offre la possibilité d’améliorer leurs conditions matérielles dans leur pays d’origine, les migrantes sont confrontées à toute une série d’assujettissements ethniques, de classe et de genre au cours de leurs séjours temporaires à l’étranger. Dans l’espoir d’un avenir autre que le travail domestique, certaines travailleuses migrantes s’engagent dans des relations intimes avec des expatriés euro-américains dans le quartier animé de Wanchai, à Hong Kong. En effet, ces relations ne compensent pas entièrement ni leur minorisation ethnique et ni leur minorisation de classe. Mais le fait de devenir des partenaires à court terme, des petites amies à long terme, ou d’éventuelles épouses, leur offre d’autres alternatives pour surmonter leur exclusion en tant que travailleuses racialisées reléguées aux périphéries spatiales et juridiques de la ville. De même, leurs partenaires masculins expatriés ont également fait part de leurs propres expériences subjectives de déracinement et de souffrances causées par des licenciements, le vieillissement et des séparations antérieures. Cette recherche ethnographique qui examine les relations intimes forgées entre ces deux groupes d’étrangers à Hong Kong – les femmes migrantes d’Asie du Sud-Est à la recherche d’un avenir meilleur et les hommes euro-américains guérissant de traumatismes professionnels et émotionnels passés – révèle des possibilités d’accroître les capacités d’aspiration, d’élargir les orientations vers l’avenir et de créer des subjectivités différentes en fonction du genre. Cet article explore la manière dont les relations intimes entretenues à Wanchai permettent de repenser ce qui pourrait être affectivement et matériellement possible dans leur avenir, au-delà du travail domestique, du vieillissement en solitaire et de la précarité économique prolongée.

EN :

I explore the relationship between social class and race, through an examination of how Black nurses enact Afropolitan cultural practices to negotiate contradictory class mobilities in Vancouver. While this paper reflexively draws from my family’s lived experiences to begin thinking through the nuances of Afropolitanism, I hone the discussion in contextual reference to the class-making practices of African-born nurses. The nurses channel Afropolitan class-making projects, through which they develop a flexibility and openness of mind that enables them to reject taking on the role of victim in their contradictory mobilities. Afropolitanism refers to “an expansive politics of inclusion that seeks to position actors as part of a transnational community of Africans of the world” (Adjepong 2021, 1), to “imbue Africanness with value” (137). Merging the literature on anti-Black racism in nursing with scholarship examining relationships between social class, race, and culture, this paper draws out the promises and pitfalls of Afropolitanism through an exploration of how African immigrant nurses—part of a growing Black Canadian middle class—grapple with contradictory mobility in Canada’s racialized terrain. It contributes to discussions of the Black middle class, in the context of a “relative newness of Black middle classes” (Rollock et al. 2012, 253).

FR :

J’explore la relation entre la classe sociale et la race en examinant la manière dont les infirmières noires adoptent des pratiques culturelles afropolitaines pour négocier des mobilités de classe contradictoires à Vancouver. Bien que cet article s’inspire, selon une approche réflexive, des expériences vécues par ma famille pour commencer à envisager les nuances de l’afropolitanisme, j’affine la discussion en me référant aux pratiques de création de classe des infirmières d’origine africaine. Les infirmières canalisent les projets de création de classes afropolitaines, à partir desquels elles développent une flexibilité et une ouverture d’esprit qui leur permettent de rejeter le rôle de victime lors de leurs mobilités contradictoires. L’afropolitanisme se réfère à « une politique d’inclusion expansive qui cherche à positionner les acteurs comme faisant partie d’une communauté transnationale d’Africains du monde » (Adjepong 2021, 1), pour « conférer une valeur à l’africanité » (Ibid., 137). En combinant la littérature sur le racisme anti-Noir dans les soins infirmiers et les études sur les relations entre la classe sociale, la race et la culture, cet article met en évidence les possibilités et les obstacles de l’afropolitanisme, en explorant la façon dont les infirmières immigrantes africaines, qui font partie d’une classe moyenne noire canadienne en plein essor, sont aux prises avec une mobilité contradictoire sur le terrain racialisé du Canada. Il contribue aux discussions sur la classe moyenne noire, dans le contexte d’une « relative nouveauté des classes moyennes noires » (Rollock et al. 2012, 253).