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Un geste artistique singulier : le théâtre-danse cum situ de Jean‑Frédéric Chevallier[Record]

  • Mariana Camargo

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  • Mariana Camargo
    Université Sorbonne Nouvelle

Version filmée de la première esquisse d’Ḥésèd, réalisée par Jean-Frédéric Chevallier et Sukla Bar : youtu.be/JOVOHQ4-bLw Et pour répondre à tes deux questions, je vais essayer de remonter loin dans le temps. Les premières petites choses que j’ai mises en scène, on disait que c’était du cirque. On faisait du trapèze, de la balançoire avec mes soeurs, mes cousins, un grand-oncle et une grand-tante. Peut-être y avait-il aussi un lapin et une poule naine qu’on nous avait donnés. C’était le plus souvent en plein air, dans un village landais. À quatorze ans, j’ai décidé de passer à quelque chose de plus élaboré, de plus théâtral, et ce, avec des répétitions de deux fois quinze jours au cours de l’année et une présentation à la famille en été (filmée, d’ailleurs). C’était dans le même village, mais dans l’usine désaffectée de mon grand-père, donc en intérieur. On pouvait utiliser les espaces qu’on voulait. On en changeait d’un spectacle à l’autre. Ensuite, après mes dix-huit ans, avec le collectif Feu Faux Lait, que j’avais fondé au sud de Paris, nous présentions nos travaux le plus souvent dans des théâtres ou des salles modulables. Autrement dit, mes premiers spectacles un peu conséquents étaient plutôt pensés pour un plateau. Reste que, déjà, ça débordait beaucoup de la stricte cage de scène : on investissait les gradins, on demandait aux techniciens d’en démonter une partie, on faisait passer le public dessous, puis par les coulisses et les ateliers. On investissait aussi des salles d’exposition et des bâtiments à l’abandon, à l’intérieur desquels le public avait à se déplacer. Donc, disons que ne pas intervenir uniquement sur une scène, je le fais depuis un bon moment. Reste qu’alors, en France, il y a eu très peu de plein air. Le travail en extérieur a commencé au Mexique. Forcément, si tu élabores un spectacle avec de jeunes enseignant·es zapatistes dans un village indígena (autochtone) du Chiapas, tu as le choix entre deux sortes d’espaces : ou bien une longue baraque en planches couverte de tôle ondulée (qui, le reste du temps, sert de salle de classe ou de réfectoire), ou bien l’esplanade herbeuse où la communauté a coutume de se réunir. Puis, beaucoup des spectacles que j’ai montés à Mexico avec le collectif Proyecto 3, dont j’étais le coordinateur, étaient répétés et présentés dans des espaces non théâtraux, notamment à l’extérieur : le patio d’une maison coloniale, les jardins d’un centre culturel, l’esplanade d’une mairie, les remparts ceinturant un cloître, une terrasse donnant sur une avenue… Autrement dit : à l’extérieur, mais dans un cadre urbain. Pour reprendre la terminologie de ta seconde question, je ne pense pas qu’il y ait eu une prise en compte de la « nature » à ce moment. On travaillait avec les éléments présents, ils étaient des « agents », oui, je pourrais le formuler ainsi aujourd’hui. D’autant qu’on répétait dans le lieu durant plusieurs mois d’affilée, ce qui nous permettait de comprendre en détail son fonctionnement, de jouer avec telles ou telles de ses caractéristiques : la texture d’un mur, la hauteur des marches d’un escalier, la largeur de la margelle d’un puits, la profondeur d’un bassin, le débit d’écoulement d’une fontaine. Y compris pour un spectacle comme A Breaking Down and a Multiplication of Tissue (2009), qui a été l’un des rares présentés sur un plateau de théâtre. C’était au théâtre Juan Ruiz de Alarcón, sur une scène très bien équipée : Romeo Castellucci y avait présenté un épisode de sa Tragedia Endogonidia (2002-2005). Et là aussi, nous avions le temps de travailler avec le lieu et ses …

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