Abstracts
Mots-clés :
- scénographie,
- Atikamekw,
- Ondinnok,
- arts,
- théâtre
Je suis allée au Salon de l’éducation, et c’est là que j’ai vu la maquette et la robe d’époque de l’École nationale de théâtre. C’est en voyant le kiosque, les plans techniques, les images de spectacles que j’ai vraiment pris conscience de l’existence de ce métier et des écoles qui l’enseignent. On dirait que, quand tu es spectateurice, tu ne te rends pas nécessairement compte de tout le travail qu’il y a derrière le spectacle. Tout le mérite va généralement aux comédien·nes et au metteur ou à la metteure en scène, mais il y a des artistes, des artisan·es qui travaillent pour rendre tout ça possible. À la fin de ma formation, le Petit Théâtre du Nord m’a proposé de faire une première scénographie. J’étais en plein dans notre production de fin d’année, en préparation d’un voyage pour participer à la Quadriennale de Prague en scénographie, avec ma cohorte. Ça se rajoutait donc à mon horaire déjà chargé, mais en même temps, c’est ça, le métier : gérer de front plein de projets et de contrats. Ce spectacle, La grande sortie (2011) de Mélanie Maynard et Jonathan Racine, a été repris au Théâtre du Rideau Vert en 2014, puis en tournée à travers le Québec. J’ai eu de la chance : ça a démarré ma carrière. Mais, en 2008, il y a eu la commission, puis, au même moment, mon frère s’est enlevé la vie. Ça a été une année difficile. J’ai fait beaucoup d’introspection en lien avec moi-même, ma famille, qui j’étais, où j’allais. Qu’est-ce qui s’était passé dans la tête de mon frère, de mes cousins et de mes oncles, qui se sont aussi enlevé la vie? La CVR, ça m’a permis de me guérir de quelque chose que je ne savais même pas que je portais. Je comprenais qu’il y avait des gens qui souffraient encore bien plus que moi, qui avaient vécu des choses inimaginables. Je me suis servie de cette rage que j’avais envers certaines personnes de ma famille qui avaient fait des choses difficiles ou blessantes (dépendances à l’alcool, aux drogues, violence conjugale, agressions physiques, mentales), et j’ai commencé à peindre des toiles de grand format en m’inspirant de ma culture. Je faisais ça à part, dans mon atelier, chez moi. Inévitablement, l’art que je développais chez moi a eu des répercussions sur ce que j’apprenais à l’école. Cela dit, ça s’est fait inconsciemment : j’ai subtilement amené ce que je portais dans mon travail. Ça paraissait dans certaines choses, mais mes professeur·es ne me disaient pas d’aller puiser dans ma culture, que c’était riche. Je pense qu’iels savaient un peu ce qui se passait avec mon frère. Je leur avais parlé de la Commission et du fait qu’il y avait plein de gens qui ne comprenaient pas les pensionnats, mais comme beaucoup, mes professeur·es n’étaient pas vraiment au courant et je n’avais pas toujours envie de parler de ça. J’ai vraiment regagné ma fierté en sortant de l’école. La CVR a eu des effets. J’ai évolué, ma famille aussi, des gens se sont confiés. Ça a fait du bien à beaucoup de personnes. Je me suis plus imprégnée de ma culture en sortant de l’école. C’est dans l’art lui-même que j’ai tout laissé sortir avec la série de toiles Kinokewin. Cette série est assez sombre. J’avais besoin d’évacuer tout ça. J’avais d’abord fait les toiles pour moi, mais un ami galeriste les a vues et m’a fortement encouragée à exposer. Il m’a dit : « Il faut que ça soit vu! » J’ai fait l’expo dans un bar. Je ne faisais pas …