Volume 7, Number 2, Fall 2023 Santé psychologique au travail
Table of contents (6 articles)
Articles
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Vers une conceptualisation de l’anxiété de performance au travail
Lauriane Maheu, Philippe Longpré and Sandrine Richard
pp. 1–9
AbstractFR:
Plusieurs situations courantes en contexte de travail sont propices à l’expérience d’anxiété de performance. Toutefois, les connaissances sur l’anxiété de performance en milieu de travail sont encore limitées. Notamment, dans la littérature, aucune des définitions ne semble bien représenter ce phénomène complexe. Cet article tente donc une première conceptualisation de l’anxiété de performance au travail en se basant sur la littérature actuelle. Plus précisément, une analyse de différentes définitions et échelles portant sur l’anxiété de performance dans divers domaines a été réalisée. La conceptualisation proposée est composée de quatre dimensions, soient les manifestations somatiques, cognitives, comportementales et affectives. Cette conceptualisation opérationalisable permettra de poursuivre les travaux des auteurs qui souhaitent développer une échelle de mesure.
EN:
Many common work situations are conducive to the experience of performance anxiety. However, knowledge of performance anxiety in the workplace is still limited. None of the definitions in the literature seems to represent this complex phenomenon well. This article therefore attempts a first conceptualization of performance anxiety in the workplace based on the current literature. More precisely, an analysis of different definitions and scales dealing with performance anxiety in various domains has been carried out. The proposed conceptualization is composed of four dimensions: somatic, cognitive, behavioral and affective manifestations. This operationalizable conceptualization will allow the authors to continue their work in developing a measurement scale.
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Toutes les formes d’abus en milieu de travail ont-elles les mêmes incidences sur la santé des travailleurs ?
Jean-Sébastien Boudrias, Vincent Roberge, Carole Sénéchal, Luc Brunet and Denis Morin
pp. 10–26
AbstractFR:
Les formes d’abus en milieu de travail sont multiples. Parmi elles, on retrouve l’incivilité, la discrimination, le harcèlement (en général), le harcèlement sexuel, l’intimidation, l’agression physique, le leadership abusif, ainsi que le climat organisationnel tolérant les abus. Sur la base des gestes impliqués, certaines formes d’abus sont qualifiées d’intensité faible (p. ex. l’incivilité), modérée (p. ex. l’intimidation) ou élevée (p. ex. l’agression physique). L’objectif de cette recension des écrits est de déterminer si ces différentes formes d’abus ont des incidences qui diffèrent en importance en ce qui a trait à la santé des travailleurs qui en sont victimes. Une recension des études quantitatives de synthèse ayant porté sur chacune de ces formes d’abus a été réalisée. Douze méta-analyses ont été répertoriées. L’analyse comparative des effets et de leurs intervalles de confiance montre qu’en général, les différentes formes d’abus ne se différencient pas quant aux liens observés sur la santé psychologique (p. ex. l'épuisement, la dépression, le stress, le bien-être, les émotions positives et négatives) et la santé physique (p. ex. les tensions physiques, les problèmes de sommeil). Les quelques différences relevées invalident l’hypothèse que l’intensité présumée des formes d’abus est associée à la taille des effets observés. Sur le plan pratique, les organisations et gestionnaires devraient ainsi porter attention à chacune de ces formes d’abus, qui semblent toutes préjudiciables pour les travailleurs. Sur le plan scientifique, l’analyse réalisée est originale dans la mesure où elle a permis de rassembler des travaux de synthèse sur huit formes d’abus qui proviennent de littératures distinctes et qui n’avaient jamais été comparées, à notre connaissance.
EN:
There are many forms of abuse in the workplace. These include incivility, discrimination, harassment (in general), sexual harassment, bullying, physical assault, abusive leadership, and an organizational climate that tolerates abuse. Based on the actions involved, some forms of abuse are classified as low (e.g., incivility), moderate (e.g., bullying), or high (e.g., physical assault) intensity. The purpose of this literature review is to determine whether these different forms of abuse have impacts that differ in magnitude with respect to the health of workers who experience them. A review of quantitative review studies that examined each of these forms of abuse was conducted. Twelve meta-analyses were identified. The comparative analysis of the effects and their confidence intervals shows that, in general, the different forms of abuse do not differ in terms of the observed links on psychological health (e.g. exhaustion, depression, stress, well-being, positive and negative emotions) and physical health (e.g. physical tension, sleep problems). The few differences identified invalidate the hypothesis that the presumed intensity of the forms of abuse is associated with the size of the observed effects. From a practical point of view, organizations and managers should therefore pay attention to each of these forms of abuse, which all seem to be detrimental to workers. From a scientific point of view, the analysis carried out is original insofar as it has made it possible to bring together synthesis works on eight forms of abuse, from distinct literatures and which had never been compared to our knowledge.
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Préserver la santé psychologique au travail : quel lien avec le capital psychologique chez des policiers belges durant la pandémie de COVID-19 ?
Sylvie Vandestrate, Laurie-Anna Dubois and Agnès Van Daele
pp. 27–42
AbstractFR:
Cette étude vise à décrire l’état de santé psychologique au travail (SPT) de policiers belges pendant la pandémie de COVID-19 et à identifier d’éventuels facteurs protecteurs. Pour ce faire, nous avons pris en compte les deux dimensions de la SPT : le bien-être psychologique au travail et la détresse psychologique au travail. Nous avons également étudié leurs liens avec plusieurs inducteurs, à savoir le capital psychologique (CaPsy), le climat de travail, les demandes et les ressources au travail. Les données ont été collectées au moyen d’un questionnaire comportant des échelles de mesure de chaque variable étudiée. Les résultats montrent que les policiers interrogés présentent majoritairement une bonne SPT malgré la pandémie. Ces résultats peuvent être reliés à la présence de facteurs protecteurs de la SPT des policiers, en particulier le CaPsy, qui est l’inducteur le plus corrélé avec les deux dimensions de la SPT et qui les prédit le mieux. Les résultats sont discutés selon le contexte de pandémie et permettent de proposer des pistes d’intervention pour la préservation d’une bonne SPT en agissant notamment sur les ressources individuelles et collectives des travailleurs.
EN:
This study aims to describe the state of the psychological health at work (PHW) of Belgian police officers during the COVID-19 pandemic and to identify possible protective factors. To do so, we considered the two PHW dimensions: psychological well-being at work and psychological distress at work. We also studied their links with several inducers, such as psychological capital (PsyCap), work climate, job demands and job resources. Data were collected by means of a questionnaire comprising measurement scales for each variable studied. Results show that police officers mostly have a good PHW, despite the pandemic. These results can be linked to the presence of protective factors of the PHW of police officers, in particular the PsyCap which has the strongest correlation with the two PHW dimensions and predicts them the most. Results are discussed regarding the pandemic and lead us to suggest avenues to preserve a good PHW enhancing individual and collective resources of workers.
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Génériques et/ou spécifiques ? Quels sont les facteurs de risque permettant d’expliquer la détresse psychologique des cadres de premier niveau ?
Sabrina Pellerin and Julie Cloutier
pp. 43–64
AbstractFR:
La littérature scientifique visant à identifier les déterminants de la détresse psychologique au travail se concentre essentiellement sur des facteurs de risque psychosociaux largement répandus dans divers types d’emplois, comme les caractéristiques des tâches (Karasek, 1979). Il s’agit de facteurs pouvant être associés à bon nombre d’occupations puisque leur conceptualisation est générique (p. ex. la charge de travail quantitative). Or les études qui s’intéressent aux facteurs spécifiques à la nature même des emplois étudiés sont encore minoritaires dans la littérature portant sur la détresse psychologique. Dans notre étude, nous investiguons les facteurs de stress associés au rôle des cadres de premier niveau, lequel est reconnu pour sa nature dite « paradoxale » (Hales, 2005). Notre objectif de recherche consiste à identifier les facteurs de stress associés à leur rôle, puis à vérifier l’influence de ceux-ci sur leur niveau de détresse psychologique. Nous optons pour une méthodologie mixte en déployant un devis de type séquentiel exploratoire (Creswell, 2009). Ce type de devis débute par une approche inductive qui permet la collecte de données qualitatives (N=14) propices à la découverte de facteurs de stress spécifiques. Le volet quantitatif subséquent permet de vérifier l’effet de ces facteurs de stress sur le niveau de détresse psychologique à l’aide de données collectées auprès d’un plus vaste échantillon (N= 243). Notre recherche mixte permet d’abord de mettre en lumière les facteurs de risque spécifiques au rôle des cadres de premier niveau, soit le conflit imputabilité/contrôle ainsi que le conflit de rôle associé à la position paradoxale qu’ils occupent. Ensuite, l’étude hypothético-déductive montre que ces facteurs spécifiques contribuent à influencer leur niveau de détresse psychologique, tout comme les facteurs de risque génériques (c.-à-d. la charge de travail quantitative). Nos résultats permettent de mieux comprendre comment les tâches et les responsabilités contribuent à engendrer de la détresse psychologique en plus de positionner les facteurs de risque spécifiques au rôle des cadres de premier niveau comme une avenue de recherche pertinente pour mieux comprendre le phénomène de la détresse psychologique au travail.
EN:
The scientific literature that aims to identify the determinants of psychological distress at work essentially focuses on psychosocial risk factors that are widespread in various types of jobs, such as task characteristics (Karasek, 1979). These are factors that can be associated with many occupations since their conceptualization is generic (e.g., quantitative workload). However, studies that focus on factors that are specific to the very nature of the jobs studied are still a minority in the literature on psychological distress. In our study, we investigate the stress factors associated with the role of the first-line manager, which is recognized for its so-called “paradoxical” nature (Hales, 2005). We aim to identify the stress factors associated with their role, and then to verify their influence on first-line managers’ psychological distress. Therefore, we opt for a mixed methodology by deploying a sequential exploratory design (Creswell, 2009). This type of design begins with an inductive approach that allows the collection of qualitative data (N=14) conducive to the discovery of specific stress factors. The quantitative study then makes it possible to verify the effect of these stress factors on the level of psychological distress using data provided from a larger sample (N= 243). Our research highlights the specific risk factors associated with the role of first-line managers, namely the accountability / control conflict as well as the role conflict related to the paradoxical position they occupy. Also, the hypothetico-deductive study shows that these specific factors contribute to influencing first-line managers’ psychological distress along with generic risk factors (i.e., quantitative workload). Our results provide a better understanding of how tasks and responsibilities contribute to engender psychological distress in addition to positioning risk factors that are specific to first-line managers as a relevant research avenue to deepen the understanding of the phenomenon of psychological distress at work.
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Débordement du bien-être psychologique de la vie personnelle vers le travail : le rôle médiateur de la performance au travail
Yanick Provost Savard, Annabelle Beauvais-St-Pierre and Véronique Dagenais-Desmarais
pp. 66–87
AbstractFR:
L’objectif de la présente étude est d’évaluer le rôle médiateur de la performance au travail dans le débordement de la satisfaction dans la vie, un indicateur de bien-être psychologique dans la vie personnelle, vers le bien-être psychologique au travail. Une étude à deux temps de mesure a été menée auprès de 436 travailleurs canadiens. Ceux-ci ont répondu à des questionnaires auto rapportés à deux reprises avec un intervalle de sept mois et demi. Les analyses soutiennent le rôle médiateur de la performance contextuelle dans la relation entre la satisfaction dans la vie et le bien-être psychologique au travail. Les résultats permettent d’enrichir les théories de l’interface travail-vie personnelle en démontrant que le bien-être psychologique peut déborder à travers la performance contextuelle au travail.
EN:
The goal of the present research is to evaluate the mediating role of job performance and its spillover of life satisfaction, a component of nonwork psychological well-being, onto psychological well-being at work. A two-wave study of 436 Canadian workers was conducted. They answered a self-reported questionnaire twice, at an interval of seven and a half months. Analyses support that contextual performance mediates the relationship between life satisfaction and psychological well-being at work. Results enrich work-non-work interface theories by demonstrating that psychological well-being can spill over through contextual performance at work.