EN :

This article critically discusses conviviality by identifying commonly conflated understandings of the concept including emic, etic, normative, and historically contingent discourses. I argue that conviviality can most usefully be understood as a particular mode of sociality, and as such is necessarily shaped by prior modes of sociality and their attendant values. Conviviality is then applied analytically to participant observation conducted in an urban peripheral community in Northeastern Brazil. I argue that, in this community, residents approached living together through the distinctive Nordestino values of self-reliance and dignity, which produced a mode of sociality anthropologists have characterized as “inter-household autonomy.” I also describe shifts in the experience of conviviality between the beginning of my fieldwork in 1998 and 2015, and thus demonstrate how modes of sociality are themselves historically contingent.

FR :

Cet article aborde la convivialité de manière critique, en identifiant les compréhensions communément confondues du concept, qui incluent les discours émiques, étiques, normatifs et historiquement contingents. Je soutiens que la convivialité peut être comprise comme un mode particulier de socialité, et qu’en tant que tel, elle est nécessairement façonnée par des modes de socialité antérieurs et les valeurs qui y sont associées. La convivialité est ensuite appliquée de façon analytique à l’observation participante menée dans une communauté urbaine périphérique du nord-est du Brésil. Je montre que, dans cette communauté, les résidents abordaient la vie en commun à travers les valeurs distinctes des Nordestino : l’autonomie et la dignité. Cela a produit un mode de socialité que les anthropologues ont qualifié d’« autonomie inter-foyers ». Je décris également les changements dans l’expérience de la convivialité entre le début de mon travail de terrain en 1998 et 2015, et ainsi, je démontre comment les modes de socialité sont eux-mêmes historiquement contingents.

EN :

Within the multicultural and multiracial city of Toronto Ontario, the space of the church is a place for racialized and white Presbyterian women to negotiate convivial hospitality, dignity, and notions of the good life. I use the concept of convivial hospitality to show how conviviality aligns with Christian hospitality when it centres on people’s will for spiritual and physical wellbeing through their relationships and interactions with others. This article focuses on the affective labour involved in the preparation of church community dinners, which were developed and organized by older, racialized Presbyterian women. Meal-time preparations are moments when convivial hospitality emerges among racialized women who pass the time by sharing their food, memories, and life stories, thus affirming a sense of dignity and belonging. Conviviality, however, takes an inhospitable turn when racialized women are subjected to undignified sociality. In exploring times when white Presbyterian women assisted with the community meals, the manner of their help coopted and disenfranchised racialized women from their service to the church and to God. What emerges is convivial inhospitality as racialized churchgoers are subjected to hierarchal interactions, making them feel like outsiders within their own church; yet, in caring for the wellbeing of white congregants to maintain social harmony and congregational unity, they tolerate the status quo which they see as Christian convivial hospitality.

FR :

Dans la ville multiculturelle et multiraciale de Toronto (Ontario), l’espace de l’église est un lieu où les femmes presbytériennes blanches et racialisées négocient l’hospitalité conviviale, la dignité et les notions de la bonne vie. J’utilise le concept d’hospitalité conviviale pour montrer comment la convivialité s’aligne sur l’hospitalité chrétienne lorsqu’elle est centrée sur la volonté de bien-être spirituel et physique des personnes à travers leurs relations et leurs interactions avec les autres. Cet article se concentre sur le travail affectif impliqué dans la préparation des dîners communautaires de l’église, qui ont été développés et organisés par des femmes presbytériennes âgées et racialisées. La préparation des repas est un moment où l’hospitalité conviviale émerge parmi les femmes racialisées qui passent le temps en partageant leur nourriture, leurs souvenirs et leurs histoires de vie, affirmant ainsi un sentiment de dignité et d’appartenance. La convivialité, cependant, devient inhospitalière lorsque les femmes racisées sont soumises à une socialité indigne. Lors de l’exploration des moments où les femmes blanches presbytériennes aidaient aux repas communautaires, la manière dont elles aidaient cooptait et privait les femmes racisées de leur service à l’église et à Dieu. Il en ressort une inhospitalité conviviale, car les fidèles racisés sont soumis à des interactions hiérarchiques qui leur donnent l’impression d’être des étrangers au sein de leur propre église. Pourtant, en se souciant du bien-être des fidèles blancs pour maintenir l’harmonie sociale et l’unité de la congrégation, les fidèles racisés tolèrent le statu quo qu’ils considèrent comme une hospitalité conviviale chrétienne.

EN :

Conviviality (convivencia), a rubric for peaceable coexistence across cultural and ethnoracial differences, has been promoted as a multifaceted educational priority in contemporary Spain, although the stakes of tolerance and civility mean quite different things for pupils of autochthonous and immigrant backgrounds. For some Moroccan youth attending school in the agricultural southeast, experiences with xenophobia and racialized exclusion have made them both fierce critics and defenders of convivial precepts. At one secondary school, questions about convivial protocols became especially pressing in the wake of accusations against several Moroccan girls for stealing sandwiches from a disabled peer. A confrontation between three of them was captured on a digital audio recorder and, in tandem with interview and observational data, suggested that convivial priorities had been pushed aside in favour of reputational attacks and disciplinary punishments. The juxtaposition of convivial ideals against reputational dynamics shows that competing logics of communicative entitlement undergirded the conflict. And in the girls’ various attempts to absolve themselves, imputations about moral character and social affiliations pointed to the need for fuller consideration of conviviality as a relational concept.

FR :

La convivialité (convivencia), une rubrique pour la coexistence pacifique au-delà des différences culturelles et ethno-raciales, a été promue comme une priorité éducative à multiples facettes dans l’Espagne contemporaine, bien que les enjeux de tolérance et de civilité aient des significations très différentes pour les élèves d’origine autochtone et ceux issus de l’immigration. Pour certains jeunes Marocains scolarisés dans le sud-est agricole, les expériences de xénophobie et d’exclusion racialisée ont fait d’eux, à la fois de farouches critiques et des défenseurs des préceptes conviviaux. Dans une école secondaire, les questions relatives aux protocoles conviviaux sont devenues particulièrement pressantes, à la suite des accusations portées contre plusieurs filles marocaines pour avoir volé des sandwichs à un camarade handicapé. Une confrontation entre trois d’entre eux a été enregistrée sur un support audio numérique et, en tandem avec les données des entretiens et des observations, a suggéré que les priorités conviviales avaient été mises de côté au profit d’atteintes à la réputation et de sanctions disciplinaires. La juxtaposition des idéaux de convivialité et de la dynamique de la réputation montre que des logiques concurrentes de droit à la communication sous-tendent le conflit. Dans les diverses tentatives des filles pour se disculper, les imputations sur le caractère moral et les affiliations sociales soulignent la nécessité d’une considération plus complète de la convivialité en tant que concept relationnel.

EN :

Brazilians like to make brincadeiras (jokes) about everything, and these brincadeiras often reveal the contradictions and tensions of the particular ways in which Brazilians behave toward social difference. This article revolves around a remark made by a public figure about domestic workers and the organized resistance of antiracism activists and allies, with a focus on Benedita da Silva, a Black Brazilian politician who called out the racism deeply imbued in the remark. This study is rooted in my observations of the contemporary cultural and historical contexts, publications on Brazilian domestic workers, my research on the recent antiracist movement in Brazil, and equally so in a linguistic anthropological approach to discourse. I demonstrate that, armed with the language of antiracism, Brazilians increasingly metadiscursively dissect convivial humour in Brazil in terms of how it enables racist discourse among Brazilians.

FR :

Les Brésiliens aiment faire des brincadeiras (des blagues) sur tout et ces brincadeiras révèlent souvent des contradictions et des tensions des manières particulières dont les Brésiliens se comportent face à la différence sociale. Cet article tourne autour d’une remarque faite par une personnalité publique sur les travailleurs domestiques et de la résistance organisée des militants antiracistes et de leurs alliés, en se concentrant sur Benedita da Silva, une politicienne brésilienne noire qui a dénoncé le racisme profondément imprégné dans cette remarque. Cette étude est ancrée dans mes observations des contextes culturels et historiques contemporains, dans des publications sur les travailleurs domestiques brésiliens, dans mes recherches sur le récent mouvement antiraciste au Brésil, et également dans une approche anthropologique linguistique du discours. Je démontre que, armés du langage de l’antiracisme, les Brésiliens dissèquent de plus en plus métadiscursivement l’humour convivial au Brésil pour voir comment il permet le discours raciste parmi les Brésiliens.

EN :

This article explores how the concepts of dignity and conviviality impact the social justice work of young-adult Muslims in the United States. Here, conviviality demands confronting and coping with historical discrimination, exploitation, and abuse (Gilroy 2004) and is examined in relation to the ideology of the Muslim ummah, a united, global community of all Muslims. However, the Muslims this article focuses on see a tension between the ideology of the ummah and the practice, which results in inequity and a lack of dignity experienced by some Muslims. The author argues that attempts at building convivial relationships inadvertently lead Muslims to feel distance and isolation from Muslim spaces and community. Their social justice work provides them with the ability to look beyond the Muslim ummah and see dignity in a shared humanity. Combined with their intellectual and academic study of social justice, these Muslims are developing their own ethical frameworks grounded in Islam. Though challenging to enact, by continually confronting their privileges, biases, and blind spots, these Muslims are striving to live, behave, and build relationships that prioritize the dignity of all people, inside the Muslim community and beyond.

FR :

Cet article explore l’impact des concepts de dignité et de convivialité sur le travail de justice sociale des jeunes adultes musulmans aux États-Unis. Ici, la convivialité exige d’affronter et de faire face à la discrimination, à l’exploitation et aux abus historiques (Gilroy 2004) ; elle est examinée en relation avec l’idéologie de l’ummah musulmane, une communauté mondiale unie de tous les Musulmans. Cependant, les Musulmans sur lesquels porte cet article constatent une tension entre l’idéologie de l’ummah et la pratique, qui se traduit par une inégalité et un manque de dignité vécus par certains Musulmans. L’auteur affirme que les tentatives de création de relations conviviales conduisent involontairement les Musulmans à ressentir une distance et un isolement par rapport aux espaces et à la communauté des Musulmans. Leur travail en faveur de la justice sociale leur donne la capacité de regarder au-delà de l’ummah musulmane et de voir la dignité dans une humanité partagée. Parallèlement à leur étude intellectuelle et académique de la justice sociale, ces Musulmans développent leurs propres cadres éthiques fondés sur l’Islam. Bien qu’il s’agisse d’un défi à relever, en confrontant continuellement leurs privilèges, leurs préjugés et leurs angles morts, ces Musulmans s’efforcent de vivre, de se comporter socialement et d’établir des relations qui donnent la priorité à la dignité de tous, au sein de la communauté musulmane et au-delà.

EN :

In this article, I explore how teachers and students in two distinct regions of the US-Mexico borderlands, southern Arizona and south Texas, treated social difference as an ethical affordance (Keane 2014) or a resource for moral stancetaking. Inspired by work in the anthropology of morality and ethnomethodological analyses of “accountable moral choice” (Heritage 1984, 76) in interaction, I examine how the salience of social difference can become an imaginative affordance for probing experiences of and possibilities for living with difference. When axes of social differentiation became relevant to ongoing interaction, participants used them to frame their own actions or others’ actions as morally admirable, justifiable, or questionable. At times, they did so in ways that foreclosed possibilities for conviviality; at other times, their “ordinary” ethical activity (Das 2012) suggested new possibilities for dealing with social difference in diverse contexts. The analysis testifies to the “internally riven” nature of the moral universe (Keane 2011, 173)—the different stances available to be taken up, even in relation to the same people and the same objects of evaluation—and underscores that conviviality is better viewed not as a lasting state of affairs, but as a provisional interactional achievement and a site of struggle and contradiction.

FR :

Dans cet article, j’explore la manière dont les enseignants et les élèves de deux régions distinctes de la frontière des États-Unis et du Mexique, au sud de l’Arizona et du Texas, ont traité les différences sociales comme une affordance éthique (Keane 2014) ou une ressource pour prendre une position morale. Inspiré par les travaux de l’anthropologie de la moralité et les analyses ethnométodologiques du « choix moral responsable » (Heritage 1984, 76) dans l’interaction, j’examine comment la saillance de la différence sociale peut devenir un moyen imaginatif de sonder les expériences et les possibilités de vivre avec la différence. Alors que les axes de différenciation sociale sont devenus pertinents pour l’interaction en cours, les participants les ont utilisés pour définir leurs propres actions ou celles des autres comme moralement admirables, justifiables ou discutables. Parfois, ils le faisaient d’une façon qui excluait toute possibilité de convivialité ; à d’autres moments, leur activité éthique « ordinaire » (Das 2012) suggérait de nouvelles possibilités de traiter la différence sociale dans divers contextes. L’analyse témoigne de la nature « intérieurement rivale » de l’univers moral (Keane 2011, 173) – les différentes positions disponibles pour être adoptées, même par rapport aux mêmes personnes et aux mêmes objets d’évaluation – et souligne que la convivialité est mieux considérée non pas comme un état de fait durable, mais comme une réalisation interactionnelle provisoire et un site de lutte et de contradiction.

EN :

In this exploratory piece, I draw from sound studies and the anthropology of sound to find my way in to a long overdue commemoration of a participant-interlocutor and friend who died in 2018. In thinking back on the significance of sound and listening in our evolving relationship, I work through my grief and loss. I offer two “listening stories” as a means to both honour Yoko and to reflect upon my own “listening habits, privilege and biases” (Robinson 2020, 72) that have implications personally as well as for anthropology more broadly.

FR :

Dans ce texte exploratoire, je m’inspire des études sonores et de l’anthropologie du son pour trouver ma voie dans une commémoration attendue depuis longtemps d’un participant-interlocuteur et ami, décédé en 2018. En repensant à l’importance du son et de l’écoute dans l’évolution de notre relation, je travaille sur mon chagrin et ma perte. Je propose deux « histoires d’écoute » en hommage à Yoko et pour réfléchir à mes propres « habitudes d’écoute, privilèges et préjugés » (Robinson 2020, 72) qui ont des implications personnelles et anthropologiques, de manière plus générale.

EN :

In the summer of 2021 as part of my PhD fieldwork, I volunteered with a “Neighbourwoods” project in Ottawa, Ontario, to inventory and assess the health of our neighbourhood’s tree canopy. The project offered me the opportunity to get a sense of residents’ relationships to trees near or on their property and think through the methodological challenge of doing ethnography with trees as well as people. With this poem, I try to extend empathy to the Manitoba Maple, a tree often considered “weedy,” “unruly,” or even “crap.” I try to use the poetic form as an act of interrelation that attempts to push against the ontological delineation between person and tree.

FR :

Dans le cadre de mes recherches doctorales de terrain, durant l’été 2021, j’ai été bénévole pour le projet « Neighbourwoods » à Ottawa, en Ontario, afin d’inventorier et d’évaluer la santé du couvert forestier de notre quartier. Ce projet m’a permis de me faire une idée des relations qu’entretiennent les résidents avec les arbres situés à proximité ou sur leur propriété, et de réfléchir au défi méthodologique que représente l’ethnographie avec les arbres et les personnes. Avec ce poème, j’essaie de faire preuve d’empathie envers l’érable du Manitoba, un arbre souvent considéré comme une « mauvaise herbe », « indiscipliné », voire « merdique ». J’essaie d’utiliser la forme poétique comme un acte d’interrelation qui tente de s’opposer à la délimitation ontologique entre la personne et l’arbre.

EN :

Urban odonyms and public art that refer to the Chilean dictatorship (1973–1990) are artifacts within the cultural landscapes of Toronto, Laval, and Montreal. As commemorative material devices, I suggest odonyms and public art offer a symbolic way to cope with the experience of exile. Furthermore, these artifacts create social relations between Chilean exiles and Canadian urban spaces that contribute to forming a foreign community and define their present and future. Using a series of photographs, I chronicle the memorialization in Canada of a traumatic period in recent Chilean history.

FR :

Les odonymes urbains et l’art public qui font référence à la dictature chilienne (1973-1990) sont des artefacts dans les paysages culturels de Toronto, Laval et Montréal. En tant que dispositifs matériels commémoratifs, je suggère que les odonymes et l’art public offrent un moyen symbolique de faire face à l’expérience de l’exil. De plus, ces artefacts créent des relations sociales entre les exilés chiliens et les espaces urbains canadiens qui contribuent à former une communauté étrangère et à définir leur présent et leur avenir. À l’aide d’une série de photographies, je fais la chronique de la commémoration, au Canada, d’une période traumatisante de l’histoire récente du Chili.

EN :

On 18 October 2019, a protest over an increase in metro fares in Santiago, Chile transformed into a nationwide uprising against inequality. As the protests evolved, it became clear that the discontent stemmed not only from the economic effects of the neoliberal model put into place during the Pinochet dictatorship (1973 to 1990), but also from the modes of relationality that it had engendered. The messages that protesters scrawled on the walls of the city insisted on the need for more empathy, respect, and dignity. Chilean artists responded by creating works that framed these individual grievances as collective experiences of a crisis in what in Spanish is called convivencia, or the art of living together. In this piece, I review the paste-up graffiti of Caiozzama, the visual mappings of Delight Lab, and the feminist performances of LASTESIS to highlight how these artists supported protesters’ call for dignity and a new mode of convivencia.

FR :

Le 18 octobre 2019, une protestation contre l’augmentation des tarifs du métro à Santiago du Chili s’est transformée en un soulèvement national contre les inégalités. Au fur et à mesure de l’évolution des manifestations, il est apparu que le mécontentement provenait non seulement des effets économiques du modèle néo-libéral mis en place pendant la dictature de Pinochet (1973-1990), mais aussi des modes de relationnalité qui en résultent. Les messages griffonnés sur les murs de la ville par les manifestants insistaient sur la nécessité de faire preuve de plus d’empathie, de respect et de dignité. Les artistes chiliens ont répondu en créant des oeuvres qui présentaient ces griefs individuels comme les expériences collectives d’une crise de ce que l’on appelle, en espagnol, la convivencia, ou l’art de vivre ensemble. Dans cet article, je passe en revue les graffitis en pâte à modeler de Caiozzama, les cartographies visuelles de Delight Lab et les performances féministes de LASTESIS pour souligner la manière dont ces artistes ont soutenu l’appel des manifestants à la dignité et à un nouveau mode de convivencia.