Inspirées par les pratiques bouddhiques ancestrales, les interventions basées sur la pleine conscience sont devenues des formes populaires de traitement en psychothérapie contemporaine (ex. Baer, 2003 ; Bishop, 2002 ; Hayes, 2004 ; Kabat-Zinn, 1994 ; Salmon, Lush, Jablonski et Sephton, 2009). En effet, la méditation de pleine conscience est associée à des bienfaits sur le plan de la santé mentale et physique (p. ex., Grossman, Nieman, Schmidt et Walach, 2003 ; Khoury et al., 2013). Ainsi, le Comité de spécialité en psychiatrie du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada reconnaît leur importance dans ses « Objectifs de formation en psychiatrie » (2009) : il requiert dorénavant que les médecins résidents en psychiatrie connaissent bien l’entraînement de la pleine conscience. Le présent article définit le concept de la pleine conscience, décrit les différents types de méditation, aborde son intégration dans l’arsenal thérapeutique en médecine occidentale, et présente les articles contenus dans ce numéro spécial de la revue Santé mentale au Québec. Selon Thich Nhat Hanh (1996), le terme pleine conscience réfère au fait de garder une conscience éveillée à la réalité présente. C’est un « état de conscience qui résulte du fait de porter son attention, intentionnellement, au moment présent, sans juger, sur l’expérience qui se déploie instant après instant » (Kabat-Zinn, 2003). Bishop et al. (2004) proposent un modèle à deux composantes de la pleine conscience : la première composante est l’autorégulation de l’attention qui est maintenue sur l’expérience immédiate, permettant une reconnaissance des événements mentaux au moment présent. La deuxième composante est une orientation particulière vers sa propre expérience, caractérisée par la curiosité, l’ouverture et l’acceptation, peu importe sa valence ou sa désirabilité. Le Questionnaire Cinq Facettes de la pleine conscience (Five Facet Mindfulness Questionnaire de Baer, Smith, Hopkins, Krietemeyer et Toney, 2006) reconnaît cinq aspects de la pleine conscience : observer (les stimuli internes ou externes tels les sensations, émotions, cognitions, vues, sons et odeurs) ; décrire (remarquer ou étiqueter verbalement ces stimuli) ; agir avec conscience (porter attention à son activité du moment, plutôt que d’agir sur le pilote automatique) ; sans porter de jugement sur l’expérience (éviter d’évaluer les sensations, cognitions ou émotions) ; et sans réagir face à l’expérience interne (permettre aux pensées et aux émotions d’évoluer dans le champ de la conscience sans qu’elles ne retiennent l’attention). Ultimement, la pleine conscience est difficile à décrire parfaitement avec des mots car il s’agit d’une expérience non verbale complexe. C’est la différence entre percevoir un son et le décrire. C’est ce à quoi fait référence le Dr Robert Béliveau (dans ce numéro) qui, dans une réflexion sur l’apport de la pleine conscience dans sa vie personnelle et professionnelle, met en garde le lecteur contre le piège de lire sur ce sujet, d’apprendre intellectuellement et de croire savoir en quoi consiste la pleine conscience plutôt que d’en faire l’expérience directe. Quatre types de méditation sont enseignés de façon typique lors de l’entraînement à la méditation de pleine conscience en Occident (Germer, 2013 ; Sharpless, 2006) : (1) la méditation de type concentration ; (2) la méditation de pleine conscience ; (3) la méditation contemplative ; et (4) la méditation créative. La méditation de type concentration requiert une focalisation de l’attention. Elle peut être comparée à un rayon laser qui illumine précisément un objet vers lequel il est dirigé. Des exemples d’objets internes de méditation incluent la respiration, des mots ou une phrase, une partie du corps. L’attention peut aussi être centrée sur des objets externes tels une image, un son, une flamme ou un point sur le mur. L’instruction typique est : …
Appendices
Bibliographie
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