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Comptes rendus

Dominique Fougeyrollas-Schwebel et Florence Rochefort (dir.), Penser avec Françoise Collin. Le féminisme et l’exercice de la liberté, Donnemarie-Dontilly, Éditions iXe, 2015, 189 p.[Record]

  • Naïma Hamrouni

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  • Naïma Hamrouni
    Université du Québec à Trois-Rivières

Dirigé par Dominique Fougeyrollas-Schwebel et Florence Rochefort, l’ouvrage Penser avec Françoise Collin. Le féminisme et l’exercice de la liberté réunit onze textes multidisciplinaires et internationaux qui, ensemble, tracent un portrait à la fois exhaustif et élogieux de l’oeuvre considérable, aussi bien philosophique que littéraire et militante, léguée par l’intellectuelle féministe belge Françoise Collin (1928-2012). Après une brève introduction à cet ouvrage qui est, à l’image de Collin, éclaté mais rigoureux, c’est le parcours de la militante engagée qui a fondé la première revue féministe francophone, Les Cahiers du GRIF, que retracent Florence Rochefort et Michelle Zancarini-Fournel dans « Les Cahiersdu Grif dans le paysage français des années 1970-1980 » (p. 31-54). Les deux auteures parviennent à faire sentir l’énergie qui se dégageait de cette époque bouillonnante, en retraçant les débats d’idées qui animaient alors les groupes de femmes. Elles y présentent surtout les différentes approches féministes (radicales, matérialistes, culturelles, éthiques) qui se sont vues formulées à travers les pages des Cahiers. Ce que l’on retient avant tout de leur texte, c’est le désir qu’a Collin de « faire apparaître le regard des femmes, [de] faire entendre la voix des femmes dans tous les domaines » (p. 35), son rejet de tout dogmatisme et l’importance qu’elle accorde à la diversité des pensées des femmes qui, ensemble, créent une véritable « culture » et « écriture féminine » (p. 45). Ces pensées féminines, plutôt que de les figer sur le papier, les Cahiers les livraient déjà « en débat » : chaque texte y était publié avec, en marge, des annotations, des commentaires, des critiques qu’y ajoutaient des collaboratrices. Manière de garder ouvertes les thèses avancées, de maintenir en mouvement la pensée, de ne jamais clore la discussion ni mettre de point final. Manière d’éviter, aussi, que la pensée se referme sur elle-même, se rétrécisse, et d’inciter la pratique réelle du doute et du dialogue. Ce style de direction révèle déjà beaucoup de l’éthique de la pratique philosophique qu’embrasse Collin et sur laquelle on en apprend davantage dans les textes intitulés « Penser avec un accent » (p. 13-29), de Rosi Braidotti, et « Le féminisme dans la philosophie » (p. 73-80), de Geneviève Fraisse. Si, à l’image des arts de combat, la philosophie semble être pour plusieurs une bataille des idées en vue de maîtriser et d’« anéantir l’adversaire », Collin plaide pour une manière de faire progresser la réflexion autrement : « Lectrice combative mais loyale, écrit Braidotti, Collin s’affronte à ses sources [de Maurice Blanchot à Hannah Arendt, d’Emmanuel Lévinas à Jacques Derrida] dans le seul souci de les compléter et de les enrichir » (p. 17). « La pensée n’est ni une guerre entre camps ni l’injonction à choisir son camp », écrivaient de manière inspirante Françoise Collin et Irène Kaufer (2014). Telle est, entre autres, la manière dont Collin fait entrer « le féminisme dans la philosophie » (p. 73), une discipline universitaire toujours hostile à la différence, et où les minorités sont dramatiquement sous-représentées. La jeunesse de Collin s’est forgée sur l’arrière-fond d’une Europe dévastée par les horreurs du fascisme et de l’Holocauste. Ces années l’ont meurtrie et lui ont très tôt instillé un sens aigu de la fragilité de la bonté et de la liberté. Ces années ont ainsi aiguisé sa méfiance à l’égard des effets de « groupe », l’ont éveillée au poids oppressant, et aux pressions conformistes, que pouvait exercer sur nos vies singulières le « collectif » (Braidotti; Rochefort et Zancarini-Fournel). Dans le texte titré « Le souffle de la liberté » (p. 55-72), Diane Lamoureux analyse le rôle central …

Appendices