McGill Law Journal
Revue de droit de McGill
Volume 64, Number 1, September 2018
Table of contents (5 articles)
Articles
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Hybrid Torts and Explanatory Tort Theory
John Murphy
pp. 1–42
AbstractEN:
This article examines the problem of fit caused by “hybrid torts” for several contemporary, explanatory theories of tort law: those belonging to Ernest Weinrib, Robert Stevens, and John Goldberg and Benjamin Zipursky. The term hybrid tort is intended to capture a cause of action that is treated routinely by practitioners, judges and doctrinal jurists alike as a tort proper even though its ingredients suggest that it is only part tort and part something else (like, for example, equity). The central argument of the article is as follows: at tort law’s borders with other legal categories, there exists a number of hybrid actions that are widely acknowledged to be torts but which comprise a range of juridical components, some of which are typical within tort law and some of which are more germane to some other legal category. This set of hybrid actions suggests that—whatever theoretical neatness might dictate—tort law’s boundaries are fuzzy and porous, not clearly defined and rigid. This fuzziness in the object of theorization naturally casts doubt on the apple-pie neatness of the theories in view. In addition, the obvious response—that these juridically mixed causes of action are not proper torts (and therefore do not require explanation)—is shown to be unavailable to the theorists whose work is examined given that each of them commits to explaining the law as it presents itself. Put differently: since the law as we encounter it clearly treats these hybrid actions as torts, they cannot be dismissed in this way. Nor, it is argued—for a combination of reasons that establish their practical significance—can these hybrid torts be dismissed as irrelevant.
FR:
Cet article examine le problème d’adéquation posé par la « responsabilité délictuelle hybride » pour plusieurs théories contemporaines explicatives : celles défendues par Ernest Weinrib, Robert Stevens, ainsi que John Goldberg et Benjamin Zipursky. Le terme « responsabilité délictuelle hybride » vise à désigner une cause d’action qui est traitée systématiquement par les practiciens, les juges et les auteurs de doctrine comme de la responsabilité délictuelle même si ses composantes suggèrent qu’il ne s’agit qu’en partie de responsabilité délictuelle et en partie d’autre chose (comme de l’equity). L’argument au coeur de l’article est le suivant : aux frontières entre la responsabilité délictuelle et d’autres catégories du droit, il existe de nombreux recours hybrides qui sont largement connus comme relevant de la responsabilité délictuelle, mais qui sont composées d’un éventail de composantes juridiques, dont certaines sont caractéristiques de la responsabilité délictuelle et d'autres en lien plus étroit avec une autre catégorie du droit. Ce nombre de recourses hybrides suggère que — peu importe l’ordre théorique imposé — les frontières de la responsabilité délictuelle sont troubles et poreuses, sans définition claire ou rigide. Ce flou entourant l’objet théorique qu’est la responsabilité délictuelle jette naturellement un doute sur l’ordre favorisé dans les théories étudiées. De plus, la réponse évidente — que ces cas à la frontière de plusieurs théories juridiques ne constituent pas de la responsabilité délictuelle à proprement parler (et ainsi ne nécessitent pas d’explications) — est présentée comme invalide pour les théoriciens présentés, dont le travail est examiné en tenant compte du fait que chacun d’eux s’engage à expliquer le droit tel qu’il se présente. Autrement dit, celui-ci traite clairement ces cas hybrides comme de la responsabilité délictuelle, ils ne peuvent être rejetés de cette catégories. Ils ne peuvent pas non plus être rejetés comme hors de propos, même si certains l’affirment pour plusieurs raisons reliées à leur portée pratique.
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🗨️, 📖, ⚖️ : que pensent les tribunaux des émojis, émoticônes et autres pictogrammes?
Laurence Bich-Carrière
pp. 43–108
AbstractFR:
Comment le droit traite-t-il les émojis, les émoticônes et autres pictogrammes numériques destinés à clarifier ou nuancer un texte écrit, dénué de ces aides à la communication que sont le ton, les expressions faciales ou la gestuelle? À travers une étude empirique de la jurisprudence canadienne, mais puisant aussi à la linguistique, la sémiologie, la théorie de la communication ou les études culturelles, le présent article vise à mettre en lumière certains biais de conception (notamment sur le plan des normes informatiques internationales) et de perception liés aux émojis et à analyser leur incidence sur le droit, particulièrement le droit judiciaire, le droit de la preuve et la méthodologie de la recherche juridique.
EN:
How does the law deal with emojis, emoticons, and other digital pictograms that are intended to clarify or nuance a written text devoid of communicative tools like tone, facial expressions or gestures? Drawing on the fields of linguistics, semiology, communication theory and cultural studies, this article undertakes an empirical study of Canadian cases in order to shed light on the various ways in which emojis are conceived (notably from the point of view of international computing norms) and perceived. The article then analyzes the consequences of these findings for the law, particularly in the areas of procedural law, evidence, and legal research methodology.
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Corporate Law Federalism in Historical Context: Comparing Canada and the United States
Camden Hutchison
pp. 109–163
AbstractEN:
Although American and Canadian corporate law share many similarities, they are also marked by important institutional differences. Among the most notable are the differing roles of federal versus state/provincial policymaking in the two countries: while American corporate law has been deeply influenced by jurisdictional competition among the states, Canadian law has instead been shaped by federal legislative activity, as seen today in the standardizing influence of the Canada Business Corporations Act. These different institutional histories have led to distinct evolutionary paths, with important substantive consequences for contemporary corporate law.
Despite considerable academic attention to the subject of corporate law federalism, these historical differences between Canada and the United States are not well understood. This article explains why jurisdictional competition arose in the United States but not Canada by examining the “Great Merger Movement” of the late nineteenth and early twentieth centuries. Specifically, this article makes three related arguments: (1) in the United States, the rise of jurisdictional competition was driven not by corporate governance issues, as is often assumed, but rather by the desire to avoid state and federal antitrust restrictions; (2) for a variety of reasons, cartelization and price fixing were more viable in Canada than the United States, delaying the onset of consolidative mergers; and (3) when the Canadian merger movement finally arrived, Canadian federal company law readily facilitated industrial consolidation, reducing the incentives for individual provinces to compete to attract company charters.
The different experiences of Canada and the United States reveal an intriguing historical irony—while Canadian corporate law is sometimes criticized as lacking in competitive responsiveness, the roots of this complacency are closely tied to the turn-of-the-century merger movement, in which Canadian law was less restrictive than its traditional American counterpart.
FR:
Malgré les nombreuses similitudes que partagent le droit des affaires américain et canadien, ils sont aussi marqués par des différences institutionnelles importantes. On compte parmi les plus notables les rôles du fédéral par rapport à ceux des états ou des provinces dans l’élaboration des politiques des deux pays; tandis que le droit des affaires américain fut grandement influencé par une compétition juridictionnelle entre les états, le droit canadien a plutôt été façonné par l’activité législative fédérale, tel qu’on le voit aujourd’hui avec l’influence de standardisation de la Loi canadienne sur les sociétés par actions.
En dépit de l’attention considérable des académiciens sur le sujet du fédéralisme en droit des affaires, ces différences historiques entre le Canada et les États-Unis ne sont pas très bien comprises. Cet article entend expliquer pourquoi une compétition juridictionnelle est survenue aux États-Unis et non au Canada, en analysant le « Grand mouvement des fusions » de la fin du dix-neuvième et du début du vingtième siècle. Plus particulièrement, cet article propose trois arguments : (1) aux États-Unis, la montée de la compétition juridictionnelle était motivée non pas par les problèmes de gouvernance des entreprises, tel qu’on le suppose souvent, mais plutôt par le désir d’éviter les restrictions anti-trust étatiques et fédérales; (2) pour plusieurs raisons, la cartellisation et la fixation des prix étaient plus viables au Canada qu’aux États-Unis, entraînant un retard à l’émergence des fusions par consolidation; et (3) lorsque le mouvement canadien des fusions survint finalement, les lois sur les compagnies fédérales canadiennes ont grandement facilité la consolidation industrielle, réduisant de ce fait les incitatifs pour les provinces à compétitionner seules pour attirer les compagnies à charte.
Les expériences différentes du Canada et des États-Unis révèlent une intéressante ironie historique — alors que le droit des affaires canadien est parfois critiqué pour son manque de réactivité à la concurrence, les racines de cette complaisance sont étroitement reliées au tournant du siècle du mouvement des fusions, lors duquel le droit canadien était moins restrictif que sa contrepartie américaine conventionnelle.
Case Comment / Chronique de jurisprudence
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L’importation interprovinciale des boissons alcoolisées à des fins personnelles : R c. Comeau et la confirmation de règles de droit de la période de la prohibition
Malaïka Bacon-Dussault
pp. 167–191
AbstractFR:
Les premières restrictions quant au libre-échange en matière de commerce interprovincial des boissons alcoolisées ont lieu au moment de la prohibition : le Parlement canadien et les provinces mettent alors en place un système de réglementation du commerce des boissons alcoolisées pour protéger la paix publique. Or, dans la décision R c. Comeau, la Cour suprême du Canada confirme des règles de droit datant de plus d’un siècle : l’objectif de la Loi sur la réglementation des alcools du Nouveau-Brunswick n’est pas de restreindre le commerce interprovincial, mais bien de réglementer la gestion de l’alcool dans la province. Dans ce commentaire d’arrêt, l’auteure cherche à exposer le lecteur au contexte historique de la réglementation du commerce interprovincial de l’alcool à des fins personnelles en abordant deux éléments. D’abord, il sera question du partage des compétences entre le Parlement canadien et les législatures provinciales en matière de réglementation du commerce interprovincial des boissons alcoolisées à des fins personnelles, le tout avec un accent particulier sur les lois néo-brunswickoises. Ensuite, l’auteure traitera de l’interprétation judiciaire de l’article 121 de la Loi constitutionnelle de 1867 et de son applicabilité en ce qui concerne le commerce interprovincial des boissons alcoolisées.
EN:
The first restrictions on the free interprovincial trade of alcoholic beverages date to the Prohibition era, when federal Parliament and the provinces established a regime to regulate the sale of alcoholic beverages in order to maintain public order. In its decision in R v. Comeau, the Supreme Court of Canada thus affirms the validity of legal rules that have existed for over a century: the purpose of the New Brunswick Liquor Control Act is not to restrict interprovincial trade, but rather to regulate the supply and use of alcohol in the province. In the present case comment, the author aims to bring to light the historical context surrounding the regulation of interprovincial trade of alcoholic beverages for personal use. The case comment will address two aspects of this context. First, it will discuss the division of powers between the Parliament of Canada and the provincial legislatures as it relates to the regulation of the interprovincial trade of alcohol for personal use, with a particular focus on the laws of New Brunswick. The author will then explore judicial interpretations of section 121 of the Constitution Act, 1867 and its applicability to the interprovincial trade of alcoholic beverages.