McGill Law Journal
Revue de droit de McGill
Volume 61, Number 3, March 2016
Table of contents (5 articles)
Articles
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Resisting Criminal Organizations: Reconceptualizing the “Political” in International Refugee Law
Amar Khoday
pp. 461–509
AbstractEN:
This article examines and reconstructs the term “political” in the 1951 Convention Relating to the Status of Refugees. Individuals may be eligible for refugee status if they can prove that they have a well-founded fear of persecution for, amongst other reasons, their political opinion. At the same time, individuals are excluded from obtaining refugee status where there are serious reasons for considering that they have committed a serious non-political crime. For those resisting persons or entities wielding oppressive power, the meaning of the term “political” in these provisions has particular importance. Where the targets of resistance are criminal organizations, however, courts and tribunals have been, for the most part, reluctant to recognize such resistance as manifesting a political opinion.
Given the demonstrated power of criminal organizations, this article contends that opposition to these entities should be viewed as being “political”. Through an examination of the text, context, and purpose of the Refugee Convention, it argues that a broader understanding of the term “political” is reasonable if not compelling. The article examines the conflicting jurisprudence and discourse surrounding “political opinion” and “political crimes”. Despite some strong voices in support of a more traditional state-centric interpretation, others have advanced more robust articulations that account for the dynamic nature and diversity of power transactions between citizens and powerful non-state actors. Finally, the article examines the substantial power of drug cartels and youth gangs in particular Central American states to illustrate that they exercise de facto control in substantial geographic spaces. As such, resistance to such entities should properly be viewed as “political” within the meaning of the Refugee Convention.
FR:
Cet article examine et reconstruit le terme « politique » tel qu’il apparait dans la Convention relative au statut des réfugiés de 1951. Un individu est admissible à l’obtention du statut de réfugié lorsqu’il craint, avec raison, d’être persécuté du fait de ses opinions politiques. Cependant, certains individus se voient privés du statut de réfugié lorsqu’il existe des raisons importantes de croire qu’ils ont commis un crime non politique grave. La signification du terme « politique » revêt donc une importance critique, particulièrement pour ceux qui sont engagés dans des actions de résistance contre des personnes ou des entités exerçant un pouvoir oppressif. Les cours et les tribunaux sont généralement réticents à caractériser de politique les activités de résistance aux organisations criminelles.
Considérant le pouvoir important que possèdent les organisations criminelles, cet article soutient que les activités de résistances à ces organisations criminelles devraient être considérées comme étant « politiques ». À travers un examen du texte, du contexte et de l’objectif de la Convention, l’auteur avance qu’une construction moins étroite du terme « politique » est à tout le moins raisonnable, sinon probante. Cet article examine la jurisprudence et les discours contradictoires relatifs à la compréhension des termes « opinion politique » et « crime politique ». Malgré un appui vocal pour l’interprétation traditionnelle limitant ce qui est politique au domaine de l’État, plusieurs soutiennent une articulation plus robuste tenant compte de la nature dynamique et des sources diverses du pouvoir. Enfin, cet article examine le pouvoir substantiel des cartels de drogues et des gangs de rue dans certains états de l’Amérique centrale de manière à illustrer comment ces organisations exercent un contrôle de facto sur de nombreux territoires. En ce sens, la résistance à de telles entités devrait être caractérisée de « politique » tel que défini par la Convention.
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Can Better Law Be Married with Corrective Justice or Evil Laws?
Sagi Peari
pp. 511–561
AbstractEN:
This article offers an innovative understanding of the better law approach to choice of law. Through addressing the terminological fallacies of traditional and contemporary choice of law literature, depicting the conceptual distinction between the two versions of better law, and making a link between the better law approach and two central notions of legal theory—corrective justice and evil laws—this article provides a comprehensive analysis of the nature of better law.
FR:
Cet article propose une compréhension novatrice de l’approche du meilleur droit en matière de conflits de lois. Il fournit une analyse complète de la nature de l’approche du meilleur droit en abordant les erreurs terminologiques de la littérature traditionnelle et contemporaine en matière de conflits de lois, en dépeignant la distinction conceptuelle entre les deux versions de cette approche, et en faisant un lien entre celle-ci et deux notions centrales en théorie du droit, soit la justice corrective et les lois immorales.
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Non-Linear Innovation
Michal Shur-Ofry
pp. 563–610
AbstractEN:
Contemporary intellectual property theory concentrates on the cumulative and incremental nature of innovation and creation. A prevalent image depicts authors and inventors as “standing on the shoulders of giants.” This article focuses on a different type of innovation that has been largely overlooked by intellectual property theory and doctrine: innovation in the domains of science and art that breaks with convention, disputes existing paradigms, and “steps off” giants’ shoulders. I term it “non-linear innovation”.
Drawing on multidisciplinary research ranging from the history of science, through network analysis of radical inventions, to studies of creativity, this article illuminates an embedded socio-cultural preference for incremental and linear novelty over paradigm-changing innovation. It then inquires whether intellectual property doctrine reflects this bias and whether the intellectual property regime can better foster non-linear innovation. The examination yields a series of counterintuitive recommendations concerning numerous patent and copyright law doctrines. More broadly, the analysis indicates that neither the “shoulders of giants” metaphor nor the opposite image of the “lone genius” adequately capture the dynamics of non-linear innovation. It further suggests that expanding intellectual property’s narrative of progress to accommodate non-linear innovation, alongside cumulative innovation, could significantly contribute to the ecosystem of innovation and creation.
FR:
La théorie de propriété intellectuelle contemporaine se concentre sur le caractère cumulatif et incrémental de l’innovation et de la création. Les auteurs et inventeurs sont dépeints « debout sur les épaules de géants ». Cet article se penche sur un type d’innovation négligé par la théorie et la doctrine de la propriété intellectuelle : l’innovation, en science et en art, qui déroge aux conventions, remet en question les paradigmes dominants et descend des épaules des géants. L’auteure la qualifie d’ « innovation non-linéaire ».
À partir de travaux multidisciplinaires allant de l’histoire des sciences aux études de la créativité, en passant par l’analyse de réseaux, l’article met en lumière un biais socio-culturel favorisant une conception linéaire du progrès. Il cherche ensuite à savoir si la doctrine en propriété intellectuelle reflète ce biais, et si la propriété intellectuelle pourrait stimuler davantage l’innovation non-linéaire. Une série de recommandations contre-intuitives quant aux doctrines du droit des brevets et des droits d’auteurs en découle. De façon générale, cette analyse indique que ni la métaphore des « épaules de géants » ni celle du « génie solitaire » ne saisissent adéquatement la dynamique de l’innovation non-linéaire. Selon notre analyse, étendre le concept de progrès à l’innovation non-linéaire, sans délaisser l’innovation cumulative, pourrait contribuer significativement à l’écosystème d’innovation et de création.
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Les expulsions pour arriérés de loyer au Québec : un contentieux de masse
Martin Gallié, Julie Brunet and Richard-Alexandre Laniel
pp. 611–666
AbstractFR:
Depuis son entrée en fonction en 1980, la Régie du logement du Québec — le tribunal en charge du contentieux entre propriétaires et locataires — reçoit entre 30 000 et 50 000 demandes d’expulsions pour arriérés de loyer par année. Ces recours représentent entre 45 % et 62 % de l’ensemble du contentieux traité par la Régie, selon les années considérées. Dans une province de huit millions d’habitant(e)s, dont 40 % sont locataires, il s’agit d’un « contentieux de masse ». À partir d’une étude de la législation, de la jurisprudence et d’une enquête de terrain à la Régie, les auteurs s’interrogent sur le droit en vigueur et la procédure relative aux deux cas précis autorisant l’expulsion pour des arriérés de loyer : le retard de plus de trois semaines et les retards fréquents. Ils décrivent une procédure expéditive notamment parce que le pouvoir discrétionnaire des magistrats pour tenir compte des obligations contractuelles des locateurs, de la proportionnalité de la décision, du témoignage et du préjudice des locataires est marginal. Il s’agit ainsi d’un contentieux largement « sans espoir », lors duquel les causes du non-paiement et les conséquences humaines et sociales de l’expulsion sont écartées. Les auteurs défendent alors l’hypothèse que ces éléments contribuent à miner la confiance des justiciables envers le système judiciaire et participent à expliquer l’absentéisme des locataires aux audiences, tout comme le taux extrêmement faible de la représentation par avocat. Dans cette perspective, ils invitent à remettre en question le droit en vigueur et sa conformité avec les règles de droit international au premier rang desquelles, le droit au logement.
EN:
Since it began operating in 1980, the Régie du logement du Québec—the tribunal responsible for disputes arising between landlords and tenants—hears anywhere between 30,000 and 50,000 applications regarding unpaid rent each year. These actions represent between 45% and 62% of all matters heard by the Régie in the material time for this study. In a province of eight million inhabitants, 40% of which are tenants, this constitutes “mass litigation”. Through a study of relevant legislation, jurisprudence, and the results of fieldwork at the Régie, the authors question the law and procedure relating to two specific justifications for evicting tenants: rent payments more than three weeks overdue and frequent late payments. This study reveals an expedited process largely attributable to the minimal discretionary power commissioners have in considering tenants’ contractual obligations, the proportionality of the decision, tenants’ testimony, and the prejudice they sustain. This litigation is therefore one “without hope”, in the course of which the causes of nonpayment and the human and social consequences of eviction are cast aside. The authors thus defend the thesis that these elements contribute to the public’s deteriorating confidence in the judicial system and partly explain tenants’ absenteeism at Régie hearings as well as the extremely low representation rate. From this perspective, the authors invite a questioning of the law as it currently stands and its conformity with international standards on housing rights.
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La philosophie politique et le Code civil du Québec : l’exemple de la notion de patrimoine
Laurence Ricard
pp. 667–719
AbstractFR:
Dans la tradition du droit civil, la réflexion sur les fondements du droit s’est scindée en deux catégories à partir du XIXe siècle : la philosophie du droit a dès lors été délaissée par les juristes au profit d’une théorie du droit, discipline fondée sur les prémisses du positivisme et consacrée à l’étude de la cohérence interne du droit. Ce faisant, la réflexion sur la conception de la justice véhiculée par les textes de droit s’est érodée. De nos jours, la philosophie du droit, une branche de la philosophie politique, connaît un essor spectaculaire dans la tradition anglo-saxonne. Les spécialistes de ce domaine utilisent les outils de la philosophie politique contemporaine pour évaluer les conséquences morales et éthiques du système juridique. Cet article cherche à démontrer la pertinence de l’analyse philosophique du droit civil, et plus particulièrement du Code civil. À titre d’exemple, l’auteure mène une analyse de la notion de patrimoine au sein du Code civil du Québec à travers le prisme des débats de philosophie politique contemporaine au sujet des différentes conceptions de la propriété.
EN:
In the civil law tradition, starting in the nineteenth century, legal thought on the foundations of law was divided into two streams: jurists discarded philosophy of law in favour of legal theory. This latter discipline was founded on the principles of positivism and devoted to the study of the internal coherence of law. This preference for legal theory eroded the reflection on the conception of justice as conveyed by texts of law. In the Anglo-Saxon tradition today, philosophy of lawa branch of political philosophyis progressing at a remarkable rate. Specialists in this area of study use contemporary political philosophy’s tools to measure legal systems’ moral and ethical consequences. This article seeks to prove the relevance of a philosophical analysis of civil law, particularly the Civil Code. Namely, the author analyzes the notion of the patrimony in the Civil Code of Québec from the vista of contemporary political philosophy debates on various conceptions of property.