McGill Law Journal
Revue de droit de McGill
Volume 58, Number 3, March 2013
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Table of contents (6 articles)
Articles
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Constitutionnalité de dispositions conférant un statut, des privilèges et des droits à une langue minoritaire : le cas singulier du Nunavut et de sa Loi sur la protection de la langue inuit
Julie Robinson and Mark C. Power
pp. 519–571
AbstractFR:
La Loi sur la protection de la langue inuit (LPLI) est une loi récente du Nunavut. Unique en son genre au Canada, elle est plus ambitieuse encore que la Charte de la langue française du Québec. Loi controversée, certains se demandent si le législateur n’aurait pas outrepassé ses pouvoirs en adoptant certaines de ses dispositions. En effet, l’article 3 de la LPLI prétend obliger les ministères, organismes ou institutions du gouvernement fédéral opérant au Nunavut à fournir leurs services destinés au public et à afficher leurs panneaux en langue inuit, alors même que ces organisations agissent à l’intérieur d’un champ de compétence fédérale. Les articles 29, 30 et 34 de la LPLI rendent obligatoire la préparation d’un plan d’action pour la langue inuit précisant la manière dont une organisation entend respecter la loi. Ce plan doit être approuvé par le commissaire aux langues, qui dispose d’un important pouvoir d’enquête relativement au respect de la loi. Au premier abord, ces dispositions semblent contredire la règle aujourd’hui acceptée selon laquelle un ordre de gouvernement peut légiférer en matière de langue dans la mesure où il le fait de manière accessoire à un champ de compétence qui lui est propre. Cette norme tire sa force de certaines particularités de la Loi constitutionnelle de 1867. Toutefois, après analyse, il appert que ce cadre conceptuel ne s’applique pas au Nunavut. Ce dernier détient bel et bien le pouvoir d’imposer sur son territoire l’utilisation de la langue inuit aux ministères, organismes et institutions du gouvernement fédéral.
EN:
The Inuit Language Protection Act (ILPA) is a recent Nunavut statute. The only one of its kind in Canada, it is even more ambitious than Quebec’s Charter of the French Language. A controversial statute, some question whether the legislator has exceeded its competence in adopting certain of its provisions. Indeed, section 3 of the ILPA aims to require federal departments, agencies, or institutions operating in Nunavut to provide public services and to display signs in the Inuit language, even when these organizations are acting within an area of federal legislative competence. Sections 29, 30, and 34 of the ILPA provide for the mandatory preparation of an Inuit Language Plan, detailing how an organization will comply with the legislation. The languages commissioner, who possesses broad powers of investigation in order to ensure compliance with the legislation, must approve this plan. At first glance, these sections seem to contradict the established rule that a government can legislate with respect to language provided that this legislation is ancillary to its own areas of competence. This rule derives from certain particularities of the Constitution Act, 1867. However, further analysis leads to the conclusion that this conceptual framework does not apply to Nunavut. The latter holds the power to require, on its territory, the use of the Inuit language by federal departments, agencies, and institutions.
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La protection d’une vitalité fragile : les droits linguistiques autochtones en vertu de l’article 35
Gabriel Poliquin
pp. 573–605
AbstractFR:
L’auteur propose d’interpréter l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et la jurisprudence pertinente à cet article à la lumière de certains principes généraux issus de la jurisprudence de la Cour suprême du Canada portant sur l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantit des droits linguistiques aux communautés de langue officielle. La thèse suivante se dégage de cette interprétation : les droits autochtones garantis à l’article 35 comprennent des droits linguistiques, dont une obligation positive de l’État de favoriser la vitalité des langues autochtones. Cette obligation de favoriser la vitalité des langues autochtones se démarque de l’obligation de l’État en matière de langues officielles qui est d’assurer l’égalité des deux communautés de langue officielle. L’obligation positive de l’État à l’égard des communautés de langues autochtones est de mettre en place les structures nécessaires à la préservation des patrimoines linguistiques autochtones pour assurer leur transmission d’une génération à l’autre. Le contenu de cette obligation pourra varier d’une communauté linguistique autochtone à l’autre selon l’écologie linguistique propre à cette communauté. L’auteur propose en outre que cette interprétation de l’article 35 est conforme aux principes promulgués par les accords internationaux auxquels le Canada est partie en matière de droits autochtones.
EN:
The author proposes an interpretation of section 35 of the Constitution Act, 1982, and its related jurisprudence, in light of certain general principles emanating from Supreme Court judgments that discuss section 23 of the Canadian Charter of Rights and Freedoms. Section 23 provides guarantees of language rights to official-language communities. The following argument flows from this interpretation: aboriginal rights in section 35 create language rights and impose a positive obligation on the state to promote the vitality of aboriginal languages. This obligation is distinct from the state’s obligation concerning official languages, which serves to ensure equality between the two official linguistic communities. The state’s positive obligation toward aboriginal linguistic communities requires the development of structures necessary for the preservation of aboriginal linguistic heritage in order to ensure its transmission from one generation to the next. The content of this obligation may vary from one linguistic community to another, depending on the linguistic environment specific to a given community. The author proposes that this interpretation of section 35 also corresponds to the principles promulgated by the international treaties concerning aboriginal rights to which Canada is a signatory.
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Two Roads Diverged: A Comparative Analysis of Indigenous Rights in a North American Constitutional Context
Peter Scott Vicaire
pp. 607–662
AbstractEN:
Fuelled by contrasting political backdrops, indigenous tribes on opposite sides of what has become the Canadian-American border have travelled upon very different trajectories, receiving dissimilar treatment from the respective governments that have laid claim to their lands.
Indian tribes in the United States have sometimes had progressive legislators and high-ranking government officials enact bold laws and policies that were instrumental in creating positive change. Inversely, Aboriginal peoples in Canada have generally had to muddle through decade after decade of middling, indifferent, or occasionally even malicious bureaucrats who have continued to be too sheepish or backward-thinking to make any significant improvements. Further, the Canadian Parliament has yet to offer any substantive legislation in the vein and magnitude of that which was vital in making positive changes for American Indian tribes, even though numerous independent sources have pointed to such an approach. Rather, decades of piecemeal legislation have served only as a half-hearted attempt to counter the more odious effects of the archaic Indian Act, while those laudable governmental voices that have called for bold, substantial change have been largely ignored.
FR:
Alimentées par des contextes politiques divergents, les tribus autochtones de part et d’autre de la frontière canado-américaine ont parcouru des trajectoires assez différentes, faisant l’objet de traitements dissimilaires de la part de leur gouvernement respectif ayant revendiqué leurs terres.
Les tribus amérindiennes aux États-Unis ont pu quelquefois profiter de la collaboration de législateurs et de responsables gouvernementaux progressistes qui ont promulgué des lois et des politiques courageuses ayant contribué à l’avènement de changements positifs. À l’inverse, les peuples autochtones du Canada ont généralement eu à se débrouiller seuls, décennie après décennie, devant des bureaucrates médiocres, indifférents, ou parfois même malveillants et trop penauds ou régressifs pour apporter des améliorations significatives. En outre, le Parlement canadien n’a toujours pas proposé de législation substantielle dans la même veine et ampleur des textes américains, et ce même à la lumière de nombreuses sources indépendantes favorisant une telle approche. Plutôt, des décennies de mesures législatives fragmentaires n’ont servi que de timide tentative pour contrer les effets les plus odieux de l’archaïque Loi sur les Indiens, alors que les voix gouvernementales louables, ayant fait appel à d’importantes et d’audacieuses améliorations, ont été largement ignorées.
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How the Charter Has Failed Non-citizens in Canada: Reviewing Thirty Years of Supreme Court of Canada Jurisprudence
Catherine Dauvergne
pp. 663–728
AbstractEN:
This article reviews the Supreme Court of Canada’s treatment of claims by non-citizens since the introduction of the Canadian Charter of Rights and Freedoms. While the early decisions in Singh and Andrews were strongly supportive of rights for non-citizens, the subsequent jurisprudence has been strikingly disappointing. This study shows that the decline in rights protections for non-citizens is a predictable consequence of some of the Court’s early interpretative positions about the Charter. This study considers all Supreme Court of Canada decisions in the thirty-year time frame. The analysis is rounded out by a consideration of cases that were not granted leave and cases that engage directly with an issue of non-citizens’ rights even where a non-citizen was not a party. The concluding section shows that non-citizens in Canada now have less access to rights protections than do non-citizens in some key comparator countries.
FR:
Cet article examine la manière dont la Cour suprême du Canada a traité des revendications de non-citoyens depuis l’introduction de la Charte canadienne des droits et libertés. Alors que les décisions Singh et Andrews protégeaient fermement les droits des non-citoyens, la jurisprudence est depuis extrêmement décevante. Cette étude démontre que la protection décroissante des droits des non-citoyens est une conséquence prévisible de certaines interprétations de la Charte effectuées par la Cour dans les années suivant son adoption. Cette étude se base sur toutes les décisions de la Cour suprême du Canada des trente dernières années. L’analyse prend aussi en considérations certaines affaires dont la demande d’autorisation d’appel fut rejetée, de même que d’autres affaires qui, bien qu’aucun non-citoyen n’y était partie, soulevaient néanmoins directement des enjeux relatifs aux droits des non-citoyens. La dernière partie illustre que les non-citoyens au Canada bénéficient désormais d’une moins grande protection de leurs droits que les non-citoyens d’autres pays.
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The Culture of Rights Protection in Canadian Refugee Law: Examining the Domestic Violence Cases
Efrat Arbel
pp. 729–771
AbstractEN:
This article examines Canadian refugee law cases involving domestic violence, analyzed through a comparison with cases involving forced sterilization and genital cutting. Surveying 645 reported decisions, it suggests that Canadian adjudicators generally adopted different methods of analysis in refugee cases involving domestic violence, as compared with these other claims. The article argues that Canadian adjudicators rarely recognized domestic violence as a rights violation in itself but, instead, demonstrated a general predisposition toward finding domestic violence persecution in cultural difference. That is, adjudicators tended to recognize domestic violence claimants not as victims of persecutory practices but rather as victims of persecutory cultures. The article suggests that this approach establishes incorrect criteria by which to evaluate domestic violence claims, for two main reasons. First, this approach does not accord due weight to complex factors besides culture that make women vulnerable to persecution in domestic settings. Second, this approach erects legal and conceptual barriers for women who cannot authentically narrate their experience through the script of cultural vulnerability or who cannot present as “victims of culture”. The article posits that characterizing the violence suffered by refugee women as a product of culture does more than erect barriers for refugee claimants; it also operates as a protective device that suppresses the commonality of domestic violence across cultures and elides its domestic prevalence. The article concludes by suggesting that this approach replicates problematic assumptions about gender violence and gender difference that make it harder to address domestic violence both abroad and at home.
FR:
Cet article examine les cas canadiens de droit des réfugiés impliquant de la violence familiale, analysés par le biais d’une comparaison avec les cas de stérilisation forcée et de mutilations génitales. Parcourant 645 décisions publiées, il suggère que les arbitres canadiens ont en général adopté différentes méthodes d’analyse dans le cas des réfugiés de violence familiale, par rapport aux autres affaires. L’article soutient que les arbitres canadiens reconnaissent rarement la violence domestique comme une violation des droits en soi, mais au contraire, ont montré une prédisposition générale à reconnaître des situations violence domestique dans la différence culturelle. Autrement dit, les arbitres ont tendance à reconnaître les demandeurs subissant de la violence conjugale non pas comme des victimes de pratiques de persécution, mais plutôt comme des victimes de cultures persécutrices. L’article suggère que cette approche établit des critères erronés d’évaluation des allégations de violence conjugale pour deux raisons principales. Tout d’abord, cette approche n’a pas accordé assez d’importance aux facteurs complexes, qui s’additionnent à la question la culture et qui rendent les femmes vulnérables à la persécution dans leur milieu familial. Ensuite, cette approche érige des barrières juridiques et conceptuelles pour les femmes qui ne peuvent pas authentiquement raconter leur expérience à travers le script de vulnérabilité culturelle ou qui ne peuvent pas se présenter comme des « victimes de leur culture ». L’article avance que la caractérisation de la violence subie par les femmes réfugiées comme un produit de la culture fait plus que d’ériger des barrières pour les demandeurs d’asile; il fonctionne également comme un dispositif de protection qui supprime le caractère commun de la violence domestique à travers les cultures et élude sa prévalence locale. L’article conclut en suggérant que cette approche reproduit des hypothèses problématiques de la violence entre les sexes et de la différence des sexes qui rendent difficile la lutte contre la violence domestique à l’étranger et à la maison.