Abstracts
Résumé
Dans un contexte mondial d’augmentation des mobilités et de la migration des personnes, les mineurs non accompagnés (MNA) fuient généralement des situations précaires et souvent dangereuses, dont la violence organisée et la guerre. Les projets de départ répondent à des vécus singuliers et localement situés auxquels se mêlent des aspirations multiples (personnelles, familiales, communautaires, etc.) visant l’amélioration des conditions d’existence. Les traumatismes et formes de victimisations vécus par certains dans leur pays d’origine et lors des franchissements irréguliers des frontières peuvent s’aggraver lors de leur arrivée au pays de destination du fait des politiques d’asile restrictives. De plus, en raison de la séparation familiale, des exigences d’adaptation immédiate aux contextes d’accueil et de la vulnérabilité liée à la difficile et aléatoire reconnaissance de leur statut de mineur, les MNA sont exposés à différents risques. Dans ce contexte de précarité, de vulnérabilité et de risque d’exclusion et de victimisation, la prise en charge et la protection des MNA doivent être rapides et efficaces afin de leur offrir un environnement stable et sécuritaire et de permettre leur insertion dans la société d’accueil.
À partir de récits de jeunes MNA de diverses origines (Afghanistan, Guinée, Mali, Burkina Faso, Érythrée, Somalie, Algérie, Maroc, Tunisie, etc.) arrivés en France et en Suisse, cet article s’intéresse aux expériences de l’exil, et plus particulièrement à l’expérience du franchissement des frontières dans leurs diverses dimensions (visibles et invisibles) lors des différentes phases de leur parcours migratoire.
Mots-clés :
- Mineurs non accompagnés,
- franchissement irrégulier des frontières,
- vulnérabilité,
- victimisation,
- France et Suisse
Abstract
In the global context of increasing mobility and migration, unaccompanied minors (UM) generally flee precarious and frequently dangerous situations, including organized violence and war. Their plans to leave represent a response to individual and locally-situated experiences, combined with numerous aspirations (personal, familial, communal, etc.) aimed at improving their living conditions. The traumas and forms of victimization experienced by certain UM in their country of origin and when crossing borders illegally can be exacerbated upon their arrival in their destination country, due to restrictive reception policies. In addition, as a result of family separation, the need to adapt immediately to a host environment and the vulnerability associated with the difficulty and uncertainty of having their status as minors recognized, UM are exposed to various risks. In this context of precariousness, vulnerability and risk of exclusion and victimization, the care and protection of UM must occur swiftly and effectively in order to offer them a stable and secure environment and enable them to integrate into the host society.
Based on the accounts of young UM of various origins (Afghanistan, Guinea, Mali, Burkina Faso, Eritrea, Somalia, Algeria, Morocco, Tunisia, etc.) who arrived in France and Switzerland, this article looks at the experiences of exile, and more specifically at the experience of crossing borders in their various dimensions (visible and invisible) during the different phases of their migratory journey.
Keywords:
- Unaccompanied minors,
- irregular border crossing,
- vulnerability,
- victimization,
- France,
- Switzerland
Resumen
En un contexto global de creciente movilidad y migración, los menores no acompañados (MENA) suelen huir de situaciones precarias y a menudo peligrosas, como la violencia organizada y la guerra. Sus planes de salida responden a experiencias individuales y localmente situadas, combinadas con múltiples aspiraciones (personales, familiares, comunitarias, etc.) dirigidas a mejorar sus condiciones de vida. Los traumas y formas de victimización que sufren algunas personas en su país de origen y al cruzar ilegalmente las fronteras pueden agravarse cuando llegan a su país de destino como consecuencia de las políticas restrictivas de asilo. Además, debido a la separación familiar, a la necesidad de adaptarse inmediatamente al entorno de acogida y a la vulnerabilidad asociada al difícil e incierto reconocimiento de su condición de menores, los MENA están expuestos a diversos riesgos. En este contexto de precariedad, vulnerabilidad y riesgo de exclusión y victimización, la atención y protección de las MENA debe ser rápida y eficaz para ofrecerles un entorno estable y seguro y permitirles integrarse en la sociedad de acogida.
A partir de los relatos de jóvenes MENA de diversos orígenes (Afganistán, Guinea, Malí, Burkina Faso, Eritrea, Somalia, Argelia, Marruecos, Túnez, etc.) llegados a Francia y Suiza, este artículo aborda las experiencias del exilio y, más concretamente, la experiencia del cruce de fronteras en sus diversas dimensiones (visibles e invisibles) durante las diferentes fases de su viaje migratorio.
Palabras clave:
- Menores no acompañados,
- cruce irregular de fronteras,
- vulnerabilidad,
- victimización,
- Francia y Suiza
Article body
Introduction
Depuis plusieurs décennies, le processus de renforcement des frontières entre les pays du Sud et du Nord s’est traduit par la mise en oeuvre de tout un ensemble de dispositifs polymorphes, visant à contrôler, voire entraver, certaines formes de mobilités humaines. D’un côté, les politiques et législations migratoires restrictives, la fermeture des frontières et la polarisation des discours face aux migrants ont contribué à dématérialiser une partie des frontières traditionnelles entre les États et à édifier un nombre croissant de murs et de barrières physiques. À cela s’ajoutent la militarisation des frontières avec le renforcement des patrouilles, la mise en place de systèmes de surveillance et de détection, les divers accords de coopération avec les pays d’origine et de transit pour éviter que les migrations non souhaitées ne puissent parvenir jusqu’en Europe. Ainsi les candidats à l’exil, dont beaucoup sont mineurs, se voient souvent contraints d’emprunter des voies devenues irrégulières, impliquant la plupart du temps des réseaux de trafiquants (Jimenez, 2013). Ce franchissement des frontières se fait généralement dans des conditions de plus en plus longues, coûteuses et périlleuses, plaçant les migrants en situation de vulnérabilité et dans un plus grand risque de victimisation, entendue comme le processus social par lequel une personne est reconnue en tant que victime et le devient (Holstein et Miller, 1990) [italiques des auteurs]. À l’occasion de leurs parcours migratoires, il est désormais courant que les jeunes migrants soient soumis au travail forcé, à différentes formes d’exploitation sexuelle, à la traite de personnes et au mariage forcé, sans oublier les nombreuses disparitions qu’a relevées le Conseil de l’Europe en 2022. L’augmentation des mouvements migratoires, notamment lorsqu’il s’agit de traversées irrégulières des frontières, vient également interroger les modalités d’accueil des pays hôtes, les rendant plus défensives et sélectives, voire discriminatoires, en fonction du pays d’origine. Ainsi, dans différents pays de destination, les jeunes migrants peinent à faire reconnaître leurs droits, compte tenu, par exemple, de mesures qui restreignent fortement l’accès aux demandes d’asile.
Chaque expérience migratoire est singulière et façonnée par une multitude de facteurs individuels, sociaux, politiques et économiques, reflétant la diversité des motivations, des contextes et des trajectoires de vie. L’expérience migratoire se réfère ici à la diversité des parcours des MNA à travers leurs récits sur la migration et le franchissement des frontières. Elle peut s’avérer plutôt positive, par exemple lorsque certains franchissent des frontières sans vivre des dangers et parviennent à faire reconnaître leur statut de MNA pour bénéficier d’un accompagnement adapté (Kaukko et Wernesjö, 2017). Cependant, d’autres jeunes vivent des situations plus dramatiques. Beaucoup se retrouvent isolés, forcés de vivre dans la clandestinité, l’exclusion ou connaissent des privations de liberté lors de détentions administratives (camps, espaces de confinement, prison) ou de mesures de renvoi (Agier, 2014). Nous le verrons, l’une des caractéristiques majeures que révèlent les récits migratoires est que, si les difficultés et les dangers du périple migratoire sont assez bien anticipés, les obstacles demeurent multiples, continuant à jalonner le parcours des jeunes après leur arrivée dans le pays de destination. L’expérience de l’exil semble prouver que l’exercice de franchissement des frontières, sous les diverses formes qu’il revêt, ne s’arrête nullement une fois les limites de l’Europe dépassées. De plus, les trajectoires migratoires ne sont pas toujours linéaires et unidirectionnelles, mais circulaires et dynamiques (Monsutti, 2005 ; Lønning, 2020). Les jeunes migrants, notamment ceux pour lesquels le statut de MNA n’a pas été reconnu, peuvent encore poursuivre leur mobilité et changer de pays ou même retourner dans leur patrie d’origine, ce qui contribue encore à les exposer à tout un ensemble de risques.
La frontière : un concept aux dimensions visibles et invisibles
Chavarochette, Demanget et Givre (2015) montrent que la frontière n’est pas seulement une limite géographique entre deux États, mais qu’elle fait partie de la vie quotidienne des individus et plus particulièrement de celle des migrants qui cherchent à les franchir dans leurs différentes dimensions (géographiques, politiques, administratives et culturelles). Agier (2013) conçoit la frontière comme un lieu, un espace d’expériences et un opérateur d’altérations. Dans un lieu de passage, El Hajj (2016) et Balibar (1994) évoquent l’existence d’une fermeture partielle de la frontière qui procède au tri des demandeurs et à la sélection (contrôles sanitaires ou sécuritaires) de ceux qui peuvent passer et ceux qui ne le peuvent pas, notamment par le biais d’une panoplie de mesures dissuasives destinées à ne laisser passer que les « bons migrants » dûment approuvés (Crépeau et Jimenez, 2002, 2013 ; Jimenez, 2010a, 2010b).
Depuis plusieurs décennies, la « sécurisation des frontières », symbole fort de la légitimité du pouvoir sur un territoire souverain (Bigo, 2005 ; Wihtol de Wenden, 2017 ; Piguet, 2019 ; Fassin et Defossez, 2024), est devenue l’une des priorités des États. Cette sécurisation s’appuie sur des technologies et des techniques mises en oeuvre pour « illégaliser », criminaliser et exclure des personnes ; pour freiner et contrôler leurs possibilités de quitter le pays d’origine ou encore pour les contraindre à y retourner (Léonard et Kaunert, 2022).
Une fois arrivés dans le pays de destination, d’autres types de barrières se révèlent aléatoires et problématiques pour les migrants. Si certaines sont invisibles (frontières culturelles et linguistiques, économiques, légales et bureaucratiques, etc.), elles ont néanmoins des impacts concrets sur la trajectoire ultérieure des migrants. En effet, comme le souligne Wihtol de Wenden (2017), même les migrants qui réussissent à franchir les obstacles juridiques (régularisation, parrainage familial, entrée légale, naturalisation, etc.) sont confrontés à d’autres effets de délimitation, comme celui de la visibilité physique. Les nouveaux arrivants, visibles, continuent à être considérés et traités comme des étrangers indésirables. Ils font l’objet de discriminations et d’exclusions en tous genres : assignation à résidence dans les cités, racisme systémique de la part des forces d’autorité, difficile accès au logement, à l’emploi, aux filières scolaires, même aux boîtes de nuit (Wihtol de Wenden, 2017). Ce sont aussi ces diverses dimensions des notions de lisière et de séparation que cet article se propose d’analyser à travers les récits de jeunes migrants.
Le concept de vulnérabilité liée à la minorité
Le concept de vulnérabilité fait référence à une « situation de faiblesse à partir de laquelle l’intégrité d’un être est ou risque d’être affectée, diminuée, altérée » (Liendle, 2012, p. 4). Sur le plan psychologique, la vulnérabilité se traduit par des déséquilibres qui perturbent le développement et le fonctionnement affectif, intellectuel, relationnel (Roland et Parot, 1991). La vulnérabilité peut également être définie comme un manque de ressources exposant les individus au risque de subir des conséquences négatives qui réduisent leur capacité à efficacement faire face aux évènements indésirables Spini et al., 2013; Spini et al., 2017). L’aspect individuel est important dans la conception de la vulnérabilité puisque les personnes sont inégalement équipées pour faire face au risque en fonction de leur âge, de leur sexe et de leur histoire personnelle (Anaut, 2003).
Plus concrètement, selon une perspective victimologique, c’est en raison de la présence d’une « vulnérabilité » ou de « facteurs de vulnérabilité » que certaines personnes constituent des cibles privilégiées et des proies faciles (Fattah, 1980). Ces personnes peuvent alors vivre une victimisation. De plus, d’après Mendelsohn, un des pères de la victimologie cité par Wemmers (2003), en mettant la victime au centre de l’analyse, il est possible d’évaluer les conséquences qu’elle a vécues, d’évaluer ses besoins, et de réfléchir aux moyens de prévention de la victimisation, entre autres, en comprenant mieux les contextes qui rendent une potentielle victime particulièrement vulnérable à la violence. Dans ce cadre, pour plusieurs personnes migrantes, les contextes de vulnérabilité peuvent résulter des raisons et des conditions de départ, de leurs parcours migratoires et de l’accueil à leur arrivée dans un nouveau pays. Sturm (2022) parle de trajectoire de vulnérabilité psychique des migrants qui vivent des ruptures sociales et culturelles pouvant les fragiliser. Chassin, Korsakoff et Mauger-Vielpeau (2020) parlent de ruptures d’ordre juridique quand les personnes migrantes ne peuvent jouir de leurs droits fondamentaux (accès aux soins de santé, hébergement, éducation, etc.) du fait de leur statut de séjour jugé illégal ou provisoire. Cela dit, en dépit de tels contextes de vulnérabilité, il ne faudrait pas négliger les processus de résistance des migrants, y compris des MNA, face aux contraintes et aux assignations (espace, identités) qu’ils vivent, ainsi que leur agentivité, même dans les situations d’incertitude et de précarité où la personne migrante dispose d’une faible marge de manoeuvre (Lems et al., 2020 ; Meloni, 2024).
Concernant la vulnérabilité spécifique d’une grande partie des enfants et des jeunes migrants, et plus particulièrement des MNA, l’expression « victimes vulnérables » est une terminologie légale reprise par plusieurs instruments juridiques internationaux, notamment onusiens. La communauté internationale reconnaît que les mineurs, en raison du fait qu’ils sont exposés à des risques et obstacles particuliers, ont des besoins différents de ceux des adultes : « Les enfants non accompagnés et séparés comptent parmi les personnes les plus vulnérables dans le contexte de la migration et sont dès lors exposés à un risque accru de violation de leurs libertés et de leurs droits fondamentaux » (Conseil de l’Europe, 2022, p. 8).
Selon la définition du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés dans la Note sur les politiques et procédures à appliquer dans le cas des enfants non accompagnés en quête d’asile (1997), un MNA est « une personne âgée de moins de 18 ans qui est séparée de ses deux parents et n’est pas prise en charge par un adulte ayant, de par la loi ou la coutume, la responsabilité de le faire » (art. 3.2). Les États signataires de cette note sont préoccupés par les circonstances complexes dans lesquelles ces enfants particulièrement vulnérables se retrouvent. En effet, de ces enfants, plusieurs peuvent fuir un danger, d’autres peuvent avoir été incités, directement ou indirectement, à quitter leur pays d’origine afin de chercher un meilleur avenir dans des régions plus développées (art. 1.1). Selon la note, les MNA n’ont souvent eu que peu de choix, voire aucun choix, lors des décisions qui les ont conduits dans cette situation. Ainsi, du fait de la reconnaissance de cette vulnérabilité, les MNA ne doivent pas se voir refuser l’accès au territoire d’un pays hôte et doivent toujours bénéficier des procédures d’asile. Par ailleurs, ils sont censés accéder de façon inconditionnelle à une prise en charge et à une protection spéciales, dans le respect des droits des enfants définis par la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CDE). Selon cette convention, les enfants, considérés comme plus vulnérables à des violations de leurs droits par leur âge et leur identité lorsqu’ils sont privés du filet de sécurité familial, jouissent de droits spécifiques destinés à les protéger, entre autres, contre toutes les formes de discrimination (art. 2) au nom de la reconnaissance de l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3.2). La CDE prévoit des obligations pertinentes concernant particulièrement les MNA : « L’État est obligé de procurer une protection spéciale pour un enfant privé de son environnement familial et de s’assurer qu’une prise en charge alternative ou un placement institutionnel est disponible » (art. 20) ; « une protection spéciale doit être attribuée à un enfant réfugié ou à un enfant demandant le statut de réfugié » (art. 22). De son côté, le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, parle de la vulnérabilité des enfants et de l’importance de leur accorder une protection spécifique. En effet, un mineur qui fait l’objet de réseaux de passeurs des migrants doit être considéré par les États Parties souscrivant le protocole comme une victime de la traite, car les enfants, en raison de leur minorité, ne peuvent consentir de façon libre et éclairée au trafic illégal des migrants (Jimenez, 2009a). Chaque État Partie doit envisager la mise en oeuvre de mesures nécessaires en vue d’assurer le rétablissement physique, psychologique et social des victimes.
Presque tous les pays du monde font partie de la CDE (196) et du Protocole (181). Ces pays s’engagent à protéger et à promouvoir les droits de l’enfant. En Europe, la France et la Suisse ont signé ces deux instruments qui les amènent à mettre en place des structures d’accueil ainsi que des mesures adaptées destinées à assurer la protection des MNA. Dans les faits, on constate toutefois de nombreux dysfonctionnements à l’application effective de ces droits, notamment en matière de reconnaissance de la minorité.
Portrait des MNA en France et en Suisse
Dans l’Union européenne (UE), le nombre de MNA a augmenté de 28 % en 2023 par rapport à l’année 2022, avec un total de 20 000 selon les chiffres de Frontex (Leclerc, 2024). En France, 14 782 ordonnances et jugements de placement des personnes reconnues MNA ont eu lieu en 2022. Parmi les participants, 93,2 % étaient des garçons, la grande majorité ayant entre 15 et 16 ans (76,52 %), 17 ans et plus avec 13,56 % et 9,93 % avaient 14 ans et moins. En 2022, la Côte d’Ivoire (17,61 %), la Guinée (17,3 %), la Tunisie (10,68 %) et le Mali (9,36 %) sont les quatre pays d’origine des MNA les plus représentés (Mission nationale mineurs non accompagnés, 2023). En Suisse, 2 450 MNA ont déposé une demande d’asile en 2022. La majorité des requérants était de sexe masculin (96,53 %), ayant majoritairement de 16 à 17 ans (71,02 %), en moindre proportion de 13-15 ans (27,39 %), alors qu’un très faible pourcentage avait entre 8-12 ans (1,51 %). Les principaux pays de provenance sont l’Afghanistan (2001), la Syrie (82), l’Algérie (62), la Turquie (41), le Burundi (37) et le Maroc (29) (Secrétariat d’État aux migrations, 2023). Les chiffres officiels des MNA en Suisse concernent uniquement ceux qui ont déposé une demande d’asile, les MNA qui vivent clandestinement étant exclus des statistiques nationales.
Objectifs et repères méthodologiques
Par la relation des expériences de l’exil des MNA, l’objectif général de cet article est de contribuer à la compréhension de la notion de frontières en soulignant ses caractéristiques et dimensions polymorphes. Plus particulièrement, il s’agit : a) de repérer dans ces expériences pré-, péri- et post-migratoires les formes de vulnérabilité et de victimisation qui sont renforcées par les législations et politiques européennes et extraeuropéennes ; et b) de documenter les diverses formes de frontières visibles et invisibles (y compris celles qui ne sont pas d’ordre territorial ou spatial, mais plutôt de nature administrative, bureaucratique, juridique, institutionnelle, culturelle ou symbolique).
Cet article s’appuie sur l’analyse d’un corpus constitué du croisement de trois projets de recherche dont le point commun est un intérêt pour les expériences des MNA arrivés en Suisse (et vivant dans le canton de Genève) et en France (Région Auvergne-Rhône-Alpes). Fondés sur le principe de la recherche participative, ces travaux ont visé à saisir dans ces deux pays les entraves actuelles de migration des MNA à partir de leurs récits. La méthodologie, par conséquent, allie différentes méthodes de recueil de données, ce qui constitue à la fois sa limite et son originalité. Ces données se composent principalement d’échanges conduits auprès de MNA de diverses origines (Afghanistan, Guinée, Mali, Burkina Faso, Érythrée, Somalie, Algérie, Maroc et Tunisie).
Le premier projet de recherche (Benyezzar, 2021-2026) relève d’une recherche ethnographique longitudinale dans le cadre d’une thèse de doctorat[3] en ethnologie/anthropologie consacrée à la situation de MNA provenant du Maghreb et ne déposant pas de demandes d’asile en arrivant en Suisse. Suivant une démarche qualitative et compréhensive, le travail s’appuie sur plus d’une centaine d’observations-participations-immersions au sein d’organisations formelles et de groupes informels (lieux de vie et d’accueil, lieux institutionnels et associatifs, etc.) et plus d’une cinquantaine d’entretiens et d’échanges informels qui ont été effectués avec d’autres MNA et ex-MNA passés par Genève.
Le second projet de recherche (Garcia Delahaye et al., 2019), mandaté par le Canton de Genève, se concentre sur les besoins exprimés par des requérants d’asile mineurs non accompagnés (RMNA)[4]. Dans le cadre d’un processus de recherche participative, la méthodologie déployée[5] a proposé à 42 jeunes RMNA (ce qui correspond à un tiers des jeunes RMNA résidents à Genève en 2019) âgés de 12 à 20 ans (4 filles et 38 garçons) de mettre en exergue leurs vécus en tant que personnes RMNA au moyen de mises en scène photographiées réalisées, présentées et analysées lors d’ateliers créatifs (Garcia Delahaye et al., 2023). Ce processus permet l’émergence de nouveaux savoirs expérientiels coproduits avec les participants en référence à l’analyse croisée de leurs images et de leurs discours en relation aux parcours migratoires et au passage des frontières.
Pour le dernier projet de recherche (Chavanon Olivier, 2019-2026), la méthodologie s’appuie sur une recherche longitudinale conduite sur sept années auprès d’une cohorte de MNA (n = 25) en France dans le cadre du programme « Parcours de MNA en Région Auvergne-Rhône-Alpes » financé par la Direction régionale des Affaires culturelles. Au cours de la période couverte par le projet (débuté en 2018), sont menés avec les MNA des entretiens non directifs à l’occasion de rencontres hebdomadaires. L’approche vise à saisir ce qui constitue l’expérience quotidienne du parcours migratoire ainsi que les diverses représentations qui y sont attachées.
Dans le cadre de cet article, l’ensemble du corpus qualitatif des trois recherches est analysé sur le principe des occurrences et des éléments transversaux les plus souvent présents dans les données en lien avec l’expérience du franchissement des frontières. Il s’agit de repérer dans l’ensemble des vécus relatés, au fil des trajectoires d’exil, les situations qui ont une valeur d’exemplification des dynamiques en matière de contextes de vulnérabilité et de victimisation. Compte tenu du caractère éminemment subjectif des matériaux colligés, la visée épistémologique est moins celle de la recherche d’une « représentativité » que d’une « significativité » des faits retenus en tant qu’ils sont dotés d’une valeur heuristique (Beaud, 1996) pour la compréhension de la situation actuelle des MNA en France et en Suisse.
Résultats
Dans la partie suivante, nous analysons dans les récits des MNA les facteurs de vulnérabilité rencontrés et les formes de victimisation vécues concernant les frontières qu’ils ont à franchir durant leur parcours migratoire, y compris celles qui sont de nature bureaucratique, administrative, juridique ou symbolique et avec lesquelles ils doivent composer une fois qu’ils atteignent un pays d’accueil potentiel, où les incertitudes quant à leur avenir sont nombreuses.
Phase prémigratoire : un franchissement des frontières à venir, mais qui fait déjà partie de l’expérience
La phase prémigratoire est l’étape de la préparation au passage des frontières géopolitiques. Les raisons qui concourent à la décision de quitter le pays d’origine sont multiples et renvoient à une diversité de contextes et de situations. Leur point commun est de contribuer à forger le sentiment que la vie sur place n’est plus possible et qu’assumer le risque du périple migratoire, aussi incertain et dangereux soit-il, reste la meilleure, voire l’unique option. Une part des MNA relate ainsi avoir assisté à des exactions ou avoir vécu des menaces sur leur intégrité physique. Dans de nombreux cas, la déstabilisation géopolitique s’entremêle avec la prise de conscience d’une absence totale de perspectives en matière d’accès à la formation ou à l’emploi du fait d’une économie dégradée. Conflits civils, gouvernance politique répressive, manque de débouchés, déclassement social sont ainsi des motifs récurrents invoqués pour justifier la décision (individuelle ou familiale) d’entamer un parcours migratoire en direction de l’Europe. H., parti d’Érythrée à l’âge de 13 ans :
Là-bas, il n’y a pas de démocratie, on ne peut pas vivre tranquillement. Qui nous a poussés à traverser la frontière ? C’est pour gagner la liberté. On sait, on savait avant de partir, il y a beaucoup de morts. Des fois, quand on n’a pas le choix, il faut essayer, soit pour une mort, soit pour une vie.
Pour les MNA originaires des pays du Maghreb, les questions socio-économiques (contextes familiaux, spatiaux, politiques, réseaux de sociabilité, etc.) sont évoquées, ainsi que des motivations d’ordre plus psychosocial (imaginaires migratoires, sentiment d’exclusion, aspirations, frustrations, etc.) qui contribuent à les convaincre de prendre des risques pour venir en Europe. Ces dimensions sont souvent imbriquées. Par exemple, le fait d’avoir de la famille ou des membres de la diaspora dans un pays européen depuis de longues années joue souvent un rôle important. Par ailleurs, beaucoup expliquent que leur imaginaire doit aux films, aux musiques et aux réseaux sociaux une forme de sentiment de proximité avec la culture européenne, comme l’explique K. :
J’ai toujours voulu vivre en Europe. Il y a tout. J’ai beaucoup de famille là-bas. Mes grands frères sont là-bas depuis 10 ans. Ils vivent à Lille. Ils nous envoient des photos. De Paris, Roubaix, Orléans, aussi. Je connais un peu. Je connais même si je ne suis jamais allé. Je vois sur Internet. Je voyage.
K., Algérien, 17 ans
Les départs en Europe sont aussi évoqués par les MNA sous forme de revendications assumées de leur droit à la mobilité mettant en avant leur agentivité et leurs capacités de mobilisations autonomes (De Genova, 2017).
Les gens en ont marre ici. Ils sortent clandestinement parce qu’on ne peut pas venir pour étudier, travailler ou faire du tourisme en Europe. Donc tu te débrouilles. Tu ne peux rien faire. Le bateau pour l’Italie ou la Turquie. Les deux sont difficiles.
A., Tunisien, 17 ans
Avant même qu’ils aient quitté leur pays d’origine, ces jeunes soulignent qu’ils sont confrontés à divers facteurs de vulnérabilité. Ils font face à différents obstacles, comme des fonds incertains, voire indisponibles, l’absence des pièces d’identité requises pour le franchissement des frontières (passeport, visa, documents d’état civil…). On constate par ailleurs que d’une manière ou d’une autre, ils sont dès le départ dépendants, à des degrés divers, d’adultes et de tiers : premier cercle familial (père, mère, frère, soeur), cercle élargi (oncles ou tantes), ou différents intermédiaires (« passeurs », « coxeurs », guides). Ainsi, les données analysées indiquent que, souvent, la décision est prise au nom du jeune par l’entourage familial qui organise et prépare certaines étapes en fonction des finances disponibles. Parfois, des personnes extérieures, qui proposent leurs services en vendant « l’eldorado occidental », vont inciter les MNA à franchir le pas grâce à leurs contacts dans des pays de transit ou aux frontières. Avant le départ pour l’Europe, les jeunes sont tributaires de ces tiers, qui ne sont pas toujours bienveillants. Par exemple, S., né d’une mère malienne et d’un père guinéen, parti à l’âge de 14 ans, préfère commettre un acte délictueux plutôt qu’être soumis à un intermédiaire en qui il n’a pas confiance, ce qui l’amène ensuite à emprunter une route longue et traumatisante :
Quand tu es un enfant, tu écoutes tes parents et les adultes. Mais je me rends compte aujourd’hui que les gens qui t’incitent à partir ne connaissent rien à ce qui t’attend vraiment ni à ce que tu vas trouver en arrivant. Beaucoup sont ignorants. Et puis il y a ceux qui veulent que tu partes parce qu’ils vont te proposer leurs services contre de l’argent. Moi, je ne voulais pas partir au départ. C’est un ami de mon père qui l’a convaincu de lui donner ses économies. Il venait souvent à la maison et je l’entendais parler avec d’autres. Ils voulaient que j’aille au Maroc, rejoindre quelqu’un. Ils étaient en train de tout organiser.
S., Guinéen, 17 ans
Il est aussi possible pour les MNA de ne pas être dépendants de passeurs en organisant leur propre traversée. Partis de Tunisie pour l’Italie, T. et ses amis se sont organisés pour se procurer un bateau et des moteurs de qualité. Ils ont mis en oeuvre tout un ensemble de stratégies pour les acquérir. Cet exemple est loin d’être isolé. Le fait de pouvoir contourner l’aide de passeurs les rend plus autonomes, tout en leur conférant un certain contrôle sur le processus de mobilité et une certaine marge de manoeuvre (durée du périple, confort lors de la traversée, choix du moment, choix de ceux qui embarquent, coût de la traversée, décision quant à l’avenir du bateau, etc.). Cela augmente selon eux les chances d’arriver à bon port :
Je te jure, le bateau c’est mieux. Rapide. Tu trouves un bon bateau, un bon moteur. Tu es un petit groupe. Tu pars quand il fait beau. Un bon pilote. Quelques passagers. Il faut ça. Pas un vieux bateau avec 50 hommes et des familles. Ça, c’est dangereux.
T., Tunisien, 17 ans
D’autres jeunes rencontrés ont pris la décision eux-mêmes et n’en ont pas parlé aux parents par peur de les effrayer. Certains n’ont donné des nouvelles qu’une fois le pays de destination atteint. D’autres ont averti leurs parents ou des proches, et ont pu avoir ou non leur consentement, voire ont pu construire ce projet avec eux en les faisant participer (chercher un « bateau sûr » pour l’Espagne ou l’Italie ou un contact au pays de destination). Un jeune raconte avoir caché à ses parents qu’il allait quitter son pays et menti sur sa destination « pour rester tranquille ».
Phase périmigratoire : multiplicité des tentatives de franchissement des frontières et traversées des frontières géopolitiques
Pour les MNA originaires des pays de l’Afrique de l’Ouest (notamment le Mali, le Burkina Faso et la Guinée), l’organisation préalable du parcours se structure autour de deux possibilités, selon le montant qui sera mobilisé. Les plus fortunés optent pour une sorte de voyage organisé et « garanti », du moins jusqu’au Maroc ou en Algérie, où les jeunes devront ensuite gérer leur passage par les différentes portes de l’Europe (l’Espagne ou l’Italie). Les moins riches composent avec un trajet par étapes, d’un pays à l’autre, où les contextes de vulnérabilité et les dangers sont plus nombreux. Le risque d’une séquestration par des groupes locaux est accentué. Il arrive qu’ils doivent payer des rançons pour ne pas être victimes d’esclavage et de traite des êtres humains lors du passage de certaines frontières. Dans tous les cas de figure (que le transit se fasse par le Maroc, l’Algérie ou la Libye), les expériences d’emprisonnement et d’extorsion de fonds sont une constante.
Les coûts prévus au départ sont généralement sous-estimés et de nombreux jeunes ont dû survivre dans les pays du nord de l’Afrique en mendiant, en acceptant divers sévices (prestations sexuelles tarifées) ou en travaillant, sans salaire, contre de la nourriture, avant de poursuivre leur parcours jusqu’en Europe. La question du financement du voyage est fondamentale. Par exemple, un jeune Tunisien arrivé en Serbie depuis la Turquie, après une tentative de passer la frontière hongroise, empêchée par l’intervention musclée des gardes-frontière, s’est résigné à demander à sa famille de lui envoyer de l’argent afin de pouvoir continuer sa route.
Dans un exemple de trajet par étapes, A., jeune Guinéen de 15 ans, explique que, grâce à la bonne situation de son père, il est allé directement jusqu’au Maroc où il est resté plus d’un an dans des conditions déplorables avant de rejoindre l’Espagne, puis la France :
Mon frère a dit qu’il allait s’occuper de faire un passeport pour le Maroc. C’est après que j’ai compris que c’était pour aller en Europe. Il m’a donné à un monsieur avec qui je suis allé au Maroc et je suis resté avec lui deux mois là-bas. Après il m’a donné à un autre monsieur qui m’a emmené dans un camp de réfugiés dans un quartier de Casablanca. Je suis resté là-bas pendant 6 mois, je crois. Des fois, on allait jusqu’à Tanger avec d’autres jeunes, mais comme on ne pouvait pas traverser, on revenait à Casablanca. Je suis allé aussi à Rabat quelques mois pour gagner un peu de sous. Je faisais de la peinture dans le bâtiment. Après la journée, le patron me disait d’aller faire le ménage chez lui. Il ne payait que rarement donc j’étais dépendant. Il a profité de ma situation pour me demander de lui faire des choses… […] Souvent, je dormais directement dans la rue. On se faisait racketter par des Marocains qui menaçaient d’appeler la police. Ils sont très racistes là-bas même si on est tous des musulmans.
A., Guinéen, 17 ans
L’enfermement au sein de centres de détention de même que les traitements dégradants que les MNA racontent avoir subis sont également des éléments récurrents. Il semblerait que ce soit particulièrement vrai pour ceux qui empruntent la route terrestre des Balkans. Malgré une clôture de barbelés de plus de 200 km, édifiée le long de la frontière avec la Turquie, la Bulgarie demeure l’une des entrées vers l’Europe. La plupart des migrants qui cherchent à passer par là sont souvent victimes des réseaux mafieux et de la corruption endémique. Ces expériences engendrent une méfiance envers les autorités. D. a quitté le Congo à 15 ans, vers la Bulgarie :
Dès que la police nous a attrapés, ils nous ont donné des coups avec leurs pieds et avec des matraques. Ils ont pointé leurs armes sur nous en criant. […] Ils m’ont pris ce que j’avais dans mon sac, mes papiers, mon téléphone, mon argent. […] Ils disaient qu’ils n’acceptaient que des Syriens. […] À Sofia (dans un centre pour migrants), il n’y avait pas assez de lits pour dormir. C’était sale et ça sentait très mauvais. Il n’y avait pas de toilettes pour se laver. On nous disait qu’il fallait qu’on paye pour manger. La nuit, on était enfermés à clé.
N., Camerounais, 16 ans
La traversée de la mer Méditerranée, compte tenu des dangers de noyade, est une étape à l’origine d’expériences souvent traumatisantes. K. est parti du Burkina Faso à 15 ans et a traversé sept pays avant d’arriver en France. Au cours de son naufrage en mer, il a vu se noyer sous ses yeux le bébé de sa belle-soeur, ainsi que cette dernière :
Quand tu traverses la mer, tu traverses aussi un questionnement sur la vie. Tu vois que tu vas sans doute mourir. Tu te demandes si Dieu aime ses propres enfants. Quand le passeur dit : « ce soir, on décolle », la première chose que les mères font c’est de donner des comprimés à leurs enfants pour les faire dormir. Le problème c’est qu’au fil des jours les bébés s’affaiblissent avec les cachets. […] Nous, la traversée, c’était la nuit. Notre boussolier (celui chargé de garder le cap) était très courageux. […] On a passé la zone tunisienne et tout le monde était calme. Vers 12 h, on voyait les montagnes de Lampedusa au loin et un bateau de pêche s’est approché. Mais le capitaine croyait que c’était la police et il a forcé le moteur en marche arrière. Le tuyau de la pompe à eau a éclaté et l’eau est entrée dans le bateau. Là, tout le monde avait peur et criait. […] Personne ne savait nager à bord. Un jeune ivoirien disait que c’était notre tour, qu’on allait tous mourir, qu’il fallait faire nos dernières prières. Les femmes hurlaient. Juste avant de couler, on a vu un tout petit bateau de pêche qui a fait demi-tour. C’est lui qui a donné l’alerte.
K., Burkinabé, 17 ans
Jalonnés de ces nombreux obstacles et formes de mise en danger (frontières terrestres et maritimes, détentions administratives, etc.), les récits recueillis concernant la traversée des frontières sont sans ambiguïté. Les facteurs de vulnérabilité se multiplient et le risque de mourir et de vivre différentes formes de victimisation (abus, exploitation, esclavage, violences physiques, etc.) est souvent la règle. C’est ce que résume S., un jeune camerounais reconnu comme mineur en France.
Aujourd’hui, accepter de partir, c’est accepter de mourir… Jamais je ne conseillerai à quelqu’un qui vit au pays de prendre le même trajet que moi. Étant donné les dangers que j’ai affrontés, ça serait un crime moral.
S., Camerounais, 16 ans
Phase postmigratoire : attentes indéterminées face à des frontières aléatoires, arbitraires et persistantes
Une fois les jeunes arrivés en Europe, leur parcours n’est pas terminé. De nombreux obstacles, que nous considérons comme des frontières invisibles, se dressent devant eux. Les situations de vulnérabilité de beaucoup de ces jeunes découlent du fait que la reconnaissance de la minorité, condition sine qua non pour qu’ils bénéficient de la protection associée au statut de MNA, est soumise à de multiples aléas et formes d’arbitraires. Les jeunes arrivent souvent sans documents d’identité. Même lorsqu’ils ont avec eux les pièces demandées, leur mise en cause par les services étatiques, notamment la Police aux frontières (PAF), est une pratique courante. Les MNA rencontrés ont eu à passer par de nombreuses démarches afin de faire reconnaître leur statut de mineur. Selon les situations individuelles, dans le cadre de la procédure de reconnaissance de minorité, des examens médicaux et des tests osseux sont évoqués.
Les autorités statuent sur la base d’un protocole censé être standardisé et objectif (un entretien individualisé). Pourtant, plusieurs travaux menés démontrent, notamment en France, que cette phase d’évaluation est entachée par des a priori de suspicion (Paté, 2021). Pour certains, le fait d’être incapable de s’exprimer en français peut les empêcher de défendre pleinement leurs droits, surtout lorsque l’entretien ressemble à un véritable interrogatoire. O., 17 ans, Algérien, raconte son audition dans le cadre de la procédure d’évaluation de la minorité devant l’Office cantonal de la population et des migrations à Genève :
J’arrive [à l’audition], il y a des policiers. La juge, « ce n’est pas la juge », me dit la traductrice, mais je crois qu’elle est juge, pas grave, elle me pose des questions. Je réponds. Elle m’interrompt toujours. Pose les mêmes questions. Tu ne comprends rien à ses questions. Je regarde mon avocat. Il ne dit rien. Je te jure, il sert à quoi ? Normalement, il doit parler plus que moi. Je parle de tout. De moi, de ma ville, de ma famille. Elle me parle de mon anniversaire, de ma classe à l’école, des anniversaires de ma famille. Des questions difficiles. J’ai oublié. Il y en a beaucoup. Je te jure, personne ne se rappelle. Et un policier te regarde quand tu parles. La traductrice t’aide pour que tu comprennes, tu expliques, mais c’est difficile. Quand je suis sorti, j’ai pensé que c’était fini la Suisse. Ils ne m’ont pas cru.
De tels exemples relèvent de l’ordinaire, au point qu’ils sont sans cesse dénoncés par les collectifs citoyens ou les associations qui interviennent pour accompagner les jeunes migrants dans leurs démarches.
La France et la Suisse jugent nécessaire la protection des MNA et imposent de mettre les jeunes migrants à l’abri pendant l’attente de l’évaluation de leur minorité. Mais les dispositifs d’évaluation de la minorité et de mise à l’abri souffrent d’un manque de ressources important, surtout en France. Beaucoup de jeunes racontent qu’ils ont erré d’abord plusieurs nuits dehors avant de pouvoir se déclarer aux services concernés. Dans des villes comme Lyon, Marseille ou Paris, des centaines de jeunes originaires du Mali, d’Albanie, de Guinée, de Côte d’Ivoire ou encore d’Algérie sont à la rue et s’organisent tant bien que mal au sein de campements de fortune, sous des tentes, en attendant que leurs dossiers soient traités. Exclus et condamnés à subir des conditions indignes en matière de logement, au mépris du droit qui prévoit le respect de la présomption de minorité (CDE), ils se voient éloignés également de l’accès aux soins ou à la scolarisation, souvent pour des périodes très longues. Cette situation est d’autant plus regrettable que deux tiers de ceux qui entament une procédure de recours devant le juge finissent par être reconnus en tant que mineurs, selon les chiffres du Défenseur des droits. Malheureusement, le temps perdu complique notamment leur parcours de scolarisation (ils n’ont souvent pas suffisamment de temps pour diplômer avant de devenir majeurs) et leur porte directement préjudice en minimisant grandement leurs chances d’obtenir un titre de séjour provisoire (Chavanon et Delarue, 2023). Par ailleurs, faute de moyens, plusieurs conseils départementaux français (auxquels incombe la politique de l’Aide sociale à l’enfance) refusent désormais la prise en charge des MNA, quitte pour cela à les déclarer abusivement comme majeurs.
À Genève, les autorités portent systématiquement plainte contre les personnes n’étant pas reconnues comme mineures au terme de la procédure d’évaluation, où une interdiction de territoire est aussi prononcée. Cette interdiction constitue une autre frontière invisible poussant les jeunes à fuir rapidement la ville de peur d’être incarcérés. En ce qui concerne les MNA qui ne déposent pas de demandes d’asile, seulement ceux qui arrivent à se faire reconnaître comme mineurs pourront rester en Suisse, au moins jusqu’à leur majorité. Sans statut légal, avec la crainte d’être expulsés à leurs 18 ans, les mineurs se trouvent en situation de marginalisation sociale, ce qui aggrave leur vulnérabilité et peut créer des difficultés d’ordre psychique. De ce fait, les MNA rencontrés vivent avec des injonctions paradoxales et des difficultés à se projeter dans un avenir en Suisse. Ils sont encouragés à fréquenter l’école, à apprendre le français, à faire des stages, à s’investir dans des activités pour s’intégrer, tout en sachant qu’à 18 ans, ils courent le risque de faire l’objet d’une décision de renvoi du pays. À cela s’ajoutent les représentations de certains intervenants qui sont en décalage avec les aspirations et les attentes des jeunes.
Je ne comprends pas. On te dit d’apprendre le français, tu vas à l’école, il y a les stages et après il faut rentrer en Tunisie à 18 ans ? On t’aide pour chercher un stage, un apprentissage et après tu rentres ? Explique-moi. Regarde. On te dit que tu as appris des choses en Suisse, que c’est bien pour travailler dans ton pays. Mais moi, je veux rester en Suisse. Je ne veux pas faire un apprentissage en Suisse pour travailler en Tunisie. Ils pensent ça. Il n’y a pas de travail là-bas. Je n’ai pas besoin de la Suisse pour ça. Moi, je veux faire une formation pour travailler en Suisse. Et si Dieu veut, rester à Genève. Alors j’attends pour trouver un apprentissage. C’est difficile. Bien travailler et après signer un contrat pour avoir les papiers. Ici, tu deviens fou. Faut être fort.
A., Tunisien, 17 ans
Les incertitudes s’accentuent quant à leurs possibilités de vivre à Genève après leur majorité. Cela les oblige à constamment réfléchir à diverses solutions et options, ici et ailleurs, et à s’informer, en autodidacte ou grâce à l’aide de travailleurs sociaux et de juristes bénévoles, quant aux lois, aux procédures et aux possibilités de recours. Citons l’expérience d’un jeune Algérien de 16 ans qui se plaignait des exigences de son foyer d’hébergement et du fait qu’on lui demandait d’aller à l’école et de s’y investir sans avoir pour autant la certitude d’obtenir un titre de séjour à sa majorité. Il a préféré quitter Genève au bout de quelques mois pour l’Espagne afin d’y faire sa vie, ayant entendu que les lois de ce pays seraient plus favorables que celles de la Suisse.
Toujours en Suisse, les requérants d’asile MNA qui obtiennent un statut de séjour provisoire identifient plusieurs barrières liées à ce statut qui les place en marge de la société. Selon leurs dires, c’est une autorisation provisoire, attribuée souvent de manière arbitraire, qui ne permet pas de s’insérer dans la communauté d’accueil, d’être reconnu comme citoyen à part entière et finalement de se construire en tant qu’adolescent et futur jeune adulte. En effet, ils obtiennent majoritairement des permis de séjour provisoires jusqu’à l’âge de 18 ans et reçoivent souvent des décisions de renvoi de la Suisse lors de leur passage à la majorité. Une fois majeurs, ces détenteurs de statut de séjour provisoire risquent par exemple de devoir retourner dans le premier pays européen dans lequel ils ont déposé leur demande d’asile. Cette situation est connue des jeunes, qui se sentent pendant un court temps en sécurité, mais très rapidement dans une impasse face à un système ambivalent se voulant protecteur tout en les maintenant dans un régime d’indétermination permanent en contradiction avec plusieurs instruments juridiques internationaux. Ces difficultés, corollaires des frontières invisibles, posent des questions fondamentales en ce qui concerne la santé psychique et l’accompagnement pluridisciplinaire.
H., Érythréen de 19 ans, arrivé en Suisse à 15 ans, met en scène l’enfermement vécu et la dépréciation ressentie face aux institutions du pays d’accueil.
Il est dans son coin et la société le regarde sans rien faire. Il se sent emprisonné. Il vit comme en prison. À Genève, on le regarde comme ça, et il s’en fiche. Tu vois, il pleure.
L’incompréhension face aux barrières imposées par la société d’accueil est mise en scène de manière inquiétante par certains jeunes qui expriment une profonde perte de sens et de tout espoir en l’avenir. Z. parle à partir de l’image qu’il a créée qui symbolise la violence ressentie dans la société d’accueil qui se retourne finalement contre les jeunes.
J’en ai marre de vivre la vie en Suisse. Je baisse les bras. J’ai perdu la joie de vivre. Je suis triste. Ma famille me manque. Ça me rend triste. Je n’ai pas envie de vivre sans ma famille. On a des amis qui se sont suicidés parce qu’on ne leur a pas donné le permis. Les jeunes dépriment beaucoup ici et ils perdent la tête (ils passent à l’acte). Certains ont dû quitter l’école, ils vont très mal. Certains sont à l’aide d’urgence. Certains sont partis dans un autre pays étranger pour déposer une demande d’asile qui a été refusée. Ils vivent en Suisse de nouveau. Aujourd’hui, ils vivent dans des conditions horribles avec 10 CHF par jour. Donc les mesures proposées aux mineurs ne sont pas adéquates pour un être humain. Il y a des jeunes qui sont devenus « faibles » à cause de ces conditions et ils ne sont plus là aujourd’hui (suicide).
Z., Afghan, 18 ans
Les conséquences des frontières invisibles du pays d’accueil en tant qu’entraves à l’insertion sociale et au développement de ces adolescents se manifestent ainsi par une détérioration alarmante de la santé psychique de certains jeunes. L’image créée par B. montre l’intériorisation de la prison comme seule condition de vie possible.
Moi je suis venu d’une prison et je suis dans une prison et la plupart du temps je m’évanouis, je perds l’équilibre, même les éducateurs ils ne peuvent rien faire. Parfois, je n’ai pas envie d’exprimer ce qui me fait mal. Comme je l’ai dit, je suis toujours en prison.
B., Érythréen, 17 ans
Par conséquent, cette dernière étape postmigratoire, à travers les procédures administratives et juridiques des pays européens d’accueil, comme la France et la Suisse, qui s’adressent exclusivement aux jeunes MNA, révèle des atteintes profondes à la santé, notamment psychique, de ces adolescents. L’exclusion et la marginalisation qu’ils vivent remettent en question l’application effective du droit international dans des pays qui ont pourtant ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant et qui sont censés garantir, notamment selon l’article 2 de cette convention, le droit à la non-discrimination des mineurs migrants.
Conclusion
Notre article avait pour objectif de contribuer à la compréhension de la notion de frontières dans ses dimensions visibles et invisibles, à partir des récits de parcours migratoires de MNA en Suisse (Genève) et en France (Région Auvergne-Rhône-Alpes). Dans les entretiens analysés, les participants ont mis en évidence la vulnérabilité générée par la traversée des frontières dans les différentes représentations qu’ils s’en font. Dès la phase prémigratoire, la conscience des risques encourus se révèle très présente, même si elle se limite en règle générale aux anticipations des dangers liés au cheminement chaotique entre les pays. Beaucoup découvrent en effet, avec désillusion, que les aléas ne cessent pas une fois qu’ils ont enfin atteint l’Europe. La plupart ont vécu l’enfermement et la détention dans les zones de transit. D’autres ont évoqué les situations multiples de mise en danger physique ou psychique, le non-respect de leurs droits en tant qu’enfants et migrants, y compris à l’intérieur de nations pourtant signataires de la CDE et du Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Par ailleurs, une présomption de mensonge pèse de plus en plus sur les MNA et contribue à ce qu’ils soient considérés comme des étrangers en situation irrégulière plutôt que comme des jeunes à protéger de façon inconditionnelle du fait de leur vulnérabilité avérée. Les carences en matière de non-respect de la présomption de minorité ou de mise à l’abri, amplement dénoncées par plusieurs ONG[6], viennent dès lors redoubler les divers traumatismes et formes de victimisation qu’ils ont pu vivre ou subir au cours de leurs parcours. L’attribut de migrant qui leur est accolé prime désormais de manière récurrente sur celui d’enfant, attestant d’un glissement progressif d’un droit universel de l’enfance en danger, qui impose protection, vers un droit spécifique et dégradé applicable aux seuls mineurs étrangers. Or, un accueil humaniste des MNA et le respect de leurs droits sont primordiaux pour qu’ils puissent répondre favorablement aux injonctions d’intégration qui leur sont adressées. On touche là du doigt les incohérences du système d’accueil. Car si les plus chanceux sont accompagnés par des organismes de soutien aux réfugiés et aux immigrants ou par des collectifs citoyens, dont l’action est un palliatif aux carences institutionnelles, d’autres sont souvent laissés à eux-mêmes sans endroit où loger, se trouvent dans un contexte de marginalité et d’exclusion, sans aucune protection, à devoir survivre dans la rue, et ce, contrairement aux principes de protection des mineurs en contexte de vulnérabilité prévus par la CDE. Ceux qui ne sont pas reconnus comme mineurs et qui entament une procédure de recours errent pour de longues périodes dans une zone grise administrative et juridique. Ces mineurs (considérés ni comme mineurs ni comme majeurs) expérimentent alors à leurs dépens les défauts de l’application de la loi et font le constat que les dispositifs censés les protéger comportent d’importantes lacunes. Les obstacles auxquels ils sont confrontés n’ayant pas été anticipés, contrairement aux difficultés et aux dangers du périple migratoire lui-même, la surprise et le dépit les amènent dans de nombreux cas à des formes graves de décompensation psychique. Un tel constat s’impose dès lors qu’on accorde du crédit à leur parole.
Appendices
Notes
-
[1]
7 Rue Marcoz, 73000 Chambéry, France
-
[2]
Les auteurs sont membres de l’équipe de recherche Création d’un réseau de recherche et de formation : mineurs non accompagnés et jeunes migrants au Canada, en France et en Suisse (MINAJE), recherche financée par le Réseau d’échanges et de liaison entre institutions d’enseignement supérieur francophones (RELIEF) de l’Université Savoie Mont Blanc, de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale et de l’Université du Québec à Trois-Rivières.
-
[3]
Le titre provisoire de la thèse de doctorat en ethnologie/anthropologie à l’Université de Neuchâtel est : Trajectoires, vécus et transitions vers l’âge adulte de jeunes mineurs étrangers arrivés en Suisse sans autorisation de séjour.
-
[4]
Les autorités du Canton de Genève distinguent les MNA des RMNA. Bien qu’ils soient tous reconnus comme mineurs non accompagnés, les seconds ont déposé une demande d’asile et sont requérants d’asile. La procédure, la prise en charge ainsi que les perspectives d’avenir sont différentes.
-
[5]
Ma Voix en Images (www.mavoixenimages.ch).
-
[6]
On citera à titre d’exemple les rapports de Human Rights Watch (2019, 18 octobre) ou de Médecins sans Frontières (2019, juillet), respectivement intitulés Des enfants migrants non accompagnés injustement poursuivis en France et Les mineurs non accompagnés, symbole d’une politique maltraitante. Rapport de la mission de Médecins Sans Frontières auprès des mineurs non accompagnés en France.
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