Abstracts
Résumé
Edwin Sutherland a été l’un des premiers à remettre en question l’association entre pauvreté et criminalité qui dominait le champ criminologique au début du xxe siècle. Il proposait non seulement que la criminologie étudie les crimes en col blanc (white-collar crimes), mais également que ces études renforcent sa théorie de l’association différentielle en tant que théorie générale, applicable à tous les types de comportements criminels. Dans cet article, nous poursuivons un objectif similaire, mais à propos du contrôle social : nous proposons de réfléchir aux formes les plus visibles de la délinquance, et plus particulièrement à la criminalité de rue, à partir de certaines études sur la réaction sociale à la délinquance des élites. Nous suggérons que la notion d’« illégalismes privilégiés » (Acosta, 1988) est appropriée pour analyser tous les illégalismes. En effet, à l’instar des crimes en col blanc, les crimes de rue sont aussi fréquemment administrés par les institutions juridiques de façon plurinormative, c’est-à-dire en s’appuyant sur différents systèmes normatifs au-delà et en plus de la justice criminelle (par exemple, le droit administratif, le droit civil, etc.). Dans les faits, cette technique a souvent pour effet de punir davantage les délinquants visés, surtout les étrangers.
Mots-clés :
- Illégalismes privilégiés,
- délinquance des élites,
- membres de gangs de rue,
- contrôle d’immigration,
- réaction sociale
Abstract
Edwin Sutherland was one of the first scholars to question the association between poverty and crime that dominated criminology in the early twentieth century. He suggested not only that criminology should study white-collar crimes but also that his theory of differential association was a general theory capable of explaining all types of criminal behaviour. In this article, we make a similar argument from a social reaction perspective. We draw from elite deviance studies to explain the social control of the most visible forms of crime, especially street crimes, and suggest that the concept of “privileged illegalities” (Acosta, 1988) is useful in analyzing how penal institutions react to all kinds of illegalities. Ultimately we argue that street crimes, similar to white-collar crimes, are governed though different normative systems (e.g. administrative law, civil law, etc.). This often results in the imposition of greater punishments, especially if the offender is foreign.
Keywords:
- Privileged illegalities,
- elite deviance,
- street gang members,
- immigration control,
- social reaction
Resumen
Edwin Sutherland fue uno de los primeros en cuestionar la asociación entre pobreza y criminalidad que dominaba el campo criminológico a principios del siglo XX. Propuso no sólo que la criminología estudie los white-collar crimes, sino que además esos estudios reforzaron su teoría de la asociación diferencial como una teoría general, aplicable a todos los tipos de comportamientos criminales. En este artículo, perseguimos un objetivo similar, pero sobre el control social : proponemos una reflexión sobre las formas más visibles de delincuencia, y más precisamente sobre la criminalidad callejera, partiendo de ciertos estudios sobre la reacción social a la delincuencia de las elites. Sugerimos que la noción de “ilegalidades privilegiadas” (Acosta, 1988) es apropiada para analizar todas las ilegalidades. De hecho, como los white-collar crimes, los delitos callejeros también son frecuentemente administrados por las instituciones jurídicas de manera plurinormativa, es decir apoyándose en diferentes sistemas normativos más allá y además de la justicia criminal (por ejemplo, el derecho administrativo, el derecho civil, etc.) En los hechos, esta técnica resulta a menudo en castigar más a los delincuentes señalados, sobretodo a los extranjeros.
Palabras clave:
- ilegalidades privilegiadas,
- delincuencia de elites,
- miembros de pandillas callejeras,
- control de la inmigración,
- reacción social
Appendices
Références
- Acosta, F. (1984). Les affaires de Ville d’Anjou ou la mise en forme pénale de la corruption politique (Thèse de doctorat inédite). Université de Montréal, Canada.
- Acosta, F. (1985). La corruption politico-administrative : émergence, constitution et éclatement d’un champ d’études. Déviance et société, 9(4), 333-354.
- Acosta, F. (1987). De l’évènement à l’infraction : le processus de mise en forme pénale. Déviance et société, 11(1), 1-40.
- Acosta, F. (1988). À propos des illégalismes privilégiés. Réflexions conceptuelles et mise en contexte. Criminologie, 21(1), 7-34.
- Amicelle, A. (2014). ‘Deux attitudes face au monde’ : La criminologie à l’épreuve des illégalismes financiers. Cultures & Conflits, 94-95-96, 65-98.
- Ashworth, A. et Zedner, L. (2010). Preventive Orders : A Problem of Under-Criminalization ? Dans R. A. Duff, L. Farmer, S. Marshall, M. Renzo et V. Tandros (dir.), The Boundaries of the Criminal Law (p. 59-87). Oxford, Royaume-Uni : Oxford University Press.
- Ashworth, A. et Zedner, L. (2012). Prevention and Criminalization : Justifications and Limits. New Criminal Law Review, 15(4), 542-571.
- Ashworth, A. et Zedner, L. (2014a). Civil Preventive Orders. Dans A. Ashworth et L. Zedner (dir.), Preventive Justice (p. 74-94). Oxford, Royaume-Uni : Oxford University Press.
- Ashworth, A. et Zedner, L. (dir.) (2014b). Preventive Justice. Oxford, Royaume-Uni : Oxford University Press.
- Ashworth, A., Zedner, L. et Tomlin, P. (dir.) (2013). Prevention and the Limits of the Criminal Law. Oxford, Royaume-Uni : Oxford University Press.
- Becker, H. S. (1963). Outsiders : Studies in the Sociology of Deviance. New York, NY : Free Press.
- Bertrand, M. A. (2008). Nouveaux courants en criminologie : “études sur la justice” et “zémiologie”. Criminologie, 41(1),177-200.
- Bourdieu, P. (1986). La force du droit : Éléments pour une sociologie du champ juridique. Actes de recherche en sciences sociales, 64, 3-19.
- Bourdieu, P. (1991). Les juristes, gardiens de l’hypocrisie collective. Dans F. Chazel et J. Commaille (dir.), Normes juridiques et régulation sociale (p. 95-99). Paris : LDGJ.
- Braithwaite, J. (1984). Corporate Crime in the pharmaceutical Industry. Londres, Royaume-Uni : Routledge.
- Burris, S., Kempa, M. et Shearing, C. (2008). Changes in Governance : A Cross-Disciplinary Review of Current Scholarship. Akron Law Review,4(1), 1-66.
- Conklin, J. E. (1977). Illegal But Not Criminal : Business Crime in America. Englewood Cliffs, NJ : Prentice Hall.
- Debuyst, C., Digneffe, F. et Pires, A. (dir.) (1998). Histoire des savoirs sur le crime et la peine 2 : la rationalité pénale et la naissance de la criminologie. Bruxelles, Belgique : Larcier.
- Ericson, R. (1981). Making Crime. Toronto. Ontario : Butterworth.
- Ericson, R. (2007). Crime in an Insecure World. Cambridge, Royaume-Uni : Polity Press.
- Falk-Moore, S. (1973). Law and Social Change : The Semi-Autonomous Social Field as an Appropriate Subject of Study. Law & Society Review, 7(4), 719-746.
- Falk-Moore, S. (1978). Law as Process : An Anthropological Approach. Londres, Royaume-Uni : Routledge.
- Foucault, M. (1975). Surveiller et punir : Naissance de la prison. Paris, France : Gallimard.
- Foucault, M. (2013). La société punitive : Cours au Collège de France, 1972-1973. Paris, France : Seuil/Gallimard.
- Galanter, M. (1991). Punishment, Civil Style : Punishment Outside the Criminal Law in the Contemporary United States. Israel Law Review, 25, 759-78.
- Galanter, M. et Luban, D. (1993). Poetic Justice : Punitive Damages and Legal Pluralism. The American University Law Review, 42, 1393-1463.
- Geertz, C. (2003). La description dense – vers une théorie interprétative de la culture. Dans D. Céfaï (dir.), L’enquête de terrain. Paris, France : La découverte, 208-233.
- Hillyard, P., Pantazis, C. et Tombs, S. (dir.) (2004). Beyond Criminology. Londres, Royaume-Uni : Pluto.
- Hulsman, L. (1986). Critical criminology and the concept of crime. Contemporary Crises, 10(1), 63-80.
- Hulsman, L. et De Celis, J. B. (1982). Peines perdues : Le Système pénal en question. Paris, France : Le Centurion.
- Lascoumes, P. (1983). Sanction des fautes ou gestion des illégalismes : l’hétérogénéisation du droit pénal. Un exemple de répression de la fraude fiscale. Revue interdisciplinaire d’études juridiques, 10, 125-156.
- Lascoumes, P. (1985). La place du pénal dans le règlement différentiel des conflits. L’Année sociologique, 35, 153-165.
- Lascoumes, P. (1986). Les affaires ou l’art de l’ombre. Paris, France : Centurion.
- Lascoumes, P. (1996). L’illégalisme, outil d’analyse. Sociétés & Représentations, 3, 78-84.
- Lévy, R. (1984). Pratiques policières et processus pénal : le flagrant délit. Paris, France : CESDIP.
- Lévy, R. (1985). Scripta manent : la rédaction des procès-verbaux de police. Sociologie du travail, 2, 408-423.
- Luhmann, N. (1995). Social Systems. Stanford, CA : Stanford University Press.
- Pearce, F. (1976). Crimes of the powerful : Marxism, crime, and deviance. Londres, Royaume-Uni : Pluto Press.
- Pires, A. P. (1993). La criminologie et ses objets paradoxaux : Réflexions épistémologiques sur un nouveau paradigme. Déviance et Société, 17, 129-161.
- Reiman, J. H. (1979). The rich get richer and the poor get prison. Toronto, Ontario : Wiley.
- Schur, E. (1971). Labeling deviant behavior : its sociological implications. New York, NY : Harper & Row.
- Shapiro, S. P. (1980). Detecting Illegalities : A Perspective on the Control of Security Violations. (Thèse de doctorat inédite). Yale University, New Haven, CT.
- Shapiro, S. P. (1984). Wayward Capitalists : Target of the Security and Exchange Commission. New Haven, CT : Yale University Press.
- Shapiro, S. P. (1985). The Road not Taken : The Elusive Path to Criminal Prosecution for White-Collar Offenders. Law and Society Review, 19(2),179-218.
- Shearing, C. (1989). Decriminalizing Criminology : Reflections on the Literal and Tropological Meaning of the Term. Canadian Journal of Criminology, 31, 169-178.
- Shearing, C. (1996). Reinventing Policing : Policing as Governance. Dans O. Manerin (dir.) Policing Change : Changing Police (p. 285-307). New York, NY : Garland Press.
- Shearing, C. et Johnston, L. (2010). Nodal Wars and Network Fallacies : A Genealogical Analysis of Global Insecurities. Theoretical Criminology, 14(4), 1-20.
- Shearing, C. et Wood, J. (2003). Nodal Governance, Democracy and the New Denizens : Challenging the Westphalian Ideal. Journal of Law and Society, 30(6), 400-19.
- Shearing, C. et Wood, J. (2007). Imagining security. Londres, Royaume-Uni : Willan.
- Slingeneyer, T. (2005). La pensée abolitionniste hulsmanienne. Archives de politique criminelle, 27, 5-36.
- Sutherland, E. H. (1931). The Prison as a Criminological Laboratory. Annals of the AmericanAcademy of Political and Social Science, 157, 131-136.
- Sutherland, E. H. (1940). White-Collar Criminality. American Sociological Review, 5(1), 1-12.
- Sutherland, E. H. (1941). Crime and Business. Annals of the American Academy of Political and Social Sciences, 217, 112-118.
- Sutherland, E. H. (1945). Is ‘White-Collar Crime’ Crime ? American Sociological Review, 10(2), 132-39.
- Sutherland, E. H. (1947). Principles of Criminology. Chicago, IL : Chicago University Press.
- Sutherland, E. H. (1983). White-Collar Crime : the Uncut Version. New Haven, CT : Yale University Press.
- Taylor, I., Walton, P. et Young, J. (1974). The new criminology. New York, NY : Harper and Row.
- Valverde, M. (2009). Jurisdiction and Scale : Legal “Technicalities” as Resources for Theory, Social and Legal Studies, 18(2) : 139-157.
- Valverde, M. (2015). Chronotopes of Law : Jurisdiction, Scale and Governance. New York, NY : Routledge.
- Van Outrive, L. (1995). La criminologie et ses objets paradoxaux : la nouveauté doit se trouver ailleurs. Déviance & Société, 19(3), 279-289.
- Vanhamme, F. (2010). La zémiologie : nouvelle discipline, extension du champ criminologique ? Revue de droit pénal et de criminologie, Décembre, 1311-1326
- Velloso, J. (2013a). Beyond criminocentric dogmatism : Mapping institutional forms of punishment in contemporary societies. Punishment & Society, 15(2), 166-186.
- Velloso, J. (2013b). Au-delà de la criminalisation : l’immigration et les enjeux pour la criminologie. Criminologie, 46(1), 55-82.
- Velloso, J. (2014). Seeking Alternatives for Criminology : the Immigration and Refugee Board Practices on the Regulation of Immigration in Canada. (Thèse de doctorat inédite). Université d’Ottawa, Canada.
- Young, J. (1999). The Exclusive Society. Londres, Royaume-Uni : Sage.