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Dossier : Metaethics, Normativity, and Value

Le réalisme moral[Record]

  • Peter Railton

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  • Peter Railton
    Universty of Michigan

  • Traduit par
    Denis Courville
    CANDIDAT AU DOCTORAT EN PHILOSOPHIE, UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL

Il existe une tendance, parmi les philosophes contemporains, à considérer le scepticisme moral comme une position irrésistible, même chez ceux pour qui le scepticisme envers les sciences empiriques ne représente absolument pas une position convaincante. Pour diverses raisons, parmi lesquelles on trouve une méfiance compréhensible envers l’absolutisme moral, on considère comme un signe de bon sens d’expliquer [explain away] toute apparence d’objectivité dans le domaine du discours moral. Il est devenu si commun de traiter la moralité comme subjective ou conventionnelle dans le cadre d’une culture intellectuelle séculière que la plupart d’entre nous éprouve de la difficulté à s’imaginer ce à quoi pourrait ressembler l’existence de faits auxquels les jugements moraux sont redevables. Loin d’être découragés, certains philosophes ont tenté de rendre compte de l’objectivité de la moralité en faisant valoir que la raison ou la science sert de fondement à l’éthique. Toutefois, l’histoire des tentatives de ce type n’inspire guère la confiance. Bien que le rationalisme en éthique ait retenu certains adhérents bien après que les autres rationalismes aient été abandonnés, les courants philosophiques puissants qui ont érodé l’idée d’une raison qui pourrait être, à elle seule, à même de nous offrir une position en fonction de laquelle des conclusions substantielles pourraient être dérivées ne manifestent aucun signe de fléchissement. Qui plus est, l’éthique naturaliste n’est pas parvenue jusqu’à présent à formuler une synthèse plausible des champs empirique et normatif : plus elle s’adonne à des analyses descriptives au sujet de l’origine des normes, moins elle retient sa force morale que l’on reconnaît; plus elle tente d’offrir une base reconnaissable à la critique ou à la reconstruction morale, moins elle retient un lien solide avec les théories psychologiques ou sociales descriptives. Dans ce qui suit, je présenterai de manière programmatique une forme de naturalisme éthique qui, bien que considérablement redevable aux idées des théoriciens antérieurs, cherche à établir une relation plus satisfaisante entre les champs normatif et empirique. Cette relation, je crois, ne peut être démontrée par aucune preuve. Mon objectif ne consiste pas à réfuter le scepticisme moral, tout comme l’objectif des naturalistes épistémiques contemporains ne consiste pas à réfuter le scepticisme cartésien. Les prétentions du naturaliste, dans un cas comme dans l’autre, sont plus modestes. Il tente d’abord d’offrir une analyse de l’épistémologie ou de l’éthique permettant de saisir comment les fonctions évaluatives centrales dans ces domaines pourraient être accomplies dans le cadre des théories empiriques actuelles (ou prospectives). Il tente ensuite de montrer comment les explications non naturalistes traditionnelles s’appuient sur des suppositions qui sont, d’une certaine manière, incohérentes, ou qui s’accordent mal avec l’état actuel des sciences. Troisièmement, il lance un certain défi au sceptique, en montrant notamment comment une explication sceptique de nos pratiques épistémiques et morales peut être aussi plausible, utile ou intéressante que l’explication proposée par le naturalisme, et comment une reconstruction de telles pratiques – si le sceptique devait tenter d’en offrir une, comme il lui arrive souvent de le faire – peut parvenir à conserver la place et la fonction typiques de ces pratiques dans l’ordre des questions humaines. Je me concentrerai principalement sur la première de ces trois aspirations. Une chose doit d’emblée être affirmée. Certains peuvent être interpellés ou repoussés par le réalisme moral sous prétexte qu’il s’agit là d’une conception de l’éthique qui est le plus à même d’exprimer le sérieux d’une haute considération pour la moralité. Or la moralité peut être prise au sérieux, même de manière excessive, sans qu’elle implique le réalisme moral. En effet, une objection possible pouvant être adressée au type de réalisme moral que je défends ici maintient que cette …

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